Par Noureddine Boukrouh
Ainsi donc, une semaine avant que tu ne tires ta dernière révérence à ce à petit coin du monde d’ici-bas que nous occupons si absurdement mais que tu continues en tout cas de hanter de ton souvenir, tu m’avais dédié ce billet inédit dont la de couverte ce matin à la Une de ton ancien journal m’a bouleversé et fendu le coeur.
A la vue de la mention «Billet inédit mon sang se glaça et je me sentis un moment interpellé par une âme en peine depuis l’Au-delà. Je me retrouvai subitement dans le rôle de Caïn dans La Conscience de Victor Hugo qui se termine sur ce vers lugubre : « L’ail était dans la tombe et regardait Caïn » D’autres évocations semblables fusèrent tout autant à mon esprit, dont le fameux « Omar m’a tué » qui a conduit il y a quelques années le Marocain Omar Radad devant les Assises françaises.
Mon bon ami, tu m’as flanqué une sacrée frousse !
Il a fallu que je relise plusieurs fois ton message pour en saisir le véritable sens de n’ai pas un souvenir précis de la déclaration que tu m’attribues, mais si tu l’as dit, c’est que ça doit être vrai. Tu devais avoir été particulièrement peiné pour lui consacrer un de tes amoureux billets. Mais pourquoi diable ne l’as-tu pas publié en son temps ? A toi, je demande humblement pardon, non d’avoir les idées et les positions qui sont les miennes, mais de t’avoir causé du chagrin à quelques jours de ton départ, même si je ne t’ai vise d’aucune façon. Je sais que là n’est pas l’excuse, car à toi seul tu étais toute la presse dont j’ai mal parlé parfois, mais jamais avec méchanceté et non sans raisons. De là où tu es, tu peux consulter le Grand Livre des destins individuels et lire à côté de mon nom les commentaires qui y figurent. Ils ne doivent pas être gravement accablants car dans tout ce que j’ai entrepris sur cette terre, je l’ai fait de bonne foi, sans intention de nuire à mes prochains. On en parlera là-bas.
Mais, à ceux qui ont décidé de publier ce billet à l’occasion de la célébration du deuxième anniversaire de ton décès qui m’a tant affecté, à l’instar de beaucoup de pose la question : « Pourquoi sa po aujourd’hui précisément ? Car si tot pas jugé utile de le publier pour des que toi seul connaissais, pourquoi a-t-on est l’encontre de tes désirs ?
De ton vivant, il t’arrivait souvent de me reprendre et de m’épingler à un sujetos autre. Tu sais bien, surtout de là où tu es, que j’ai toujours reçu cela comme un reproche amical plutôt qu’une condamnation, comme un témoignage de sympathie plutôt qu’une marque de haine. Je te savais sans haine et sans violence à l’égard de quiconque et de quoi que ce soit, comme tu me savais sincère et honnête, même dans mes erreurs et mes betises.
Etre cité dans tes billets était pour moi un honneur et un motif de fierté. Une certaine connivence tenant à la manière de percevoir et de dire les choses nous unissait malgré nos évidentes divergences. Pardon encore pour la peine que j’ai pu te causer dans la première vie. Dans la seconde, tu as déjà un avantage.
Repose en paix et à bientôt.
LE MATIN DU 4/12/1996
MESMAR J’HA : A M. Boukrouh
Par Said Mekbel
Je dédie humblement à Noureddine Boukrouh, le président du PRA, ce souvenir personnel. Que le lecteur veuille bien m’excuser c’est la seule réponse valable que j’ai pu trouver à son propos télévisé dans lequel il a accusé la presse indépendante de « semer la désolation et le désespoir ».
Cela s’est passé autour de cette période terrible du Ramadhan dernier. Une seconde tentative d’assassinat m’avait mis moralement à genoux, avec un moral devenu si plat que je m’étais mis à envisager les choses les plus désespérées. Heureusement, un cercle d’amis veillait qui crut bien faire un jour en m’emmenant diner chez un leader politique bien établi comptait un peu sur lui pour me remonter.
Arrivée chez ce grand patron politique. Accolades à vous écraser la poitrine. Embrassades bruyantes et humides. Après cette chaleureuse démonstration, le grand homme a parlé, savez-vous ce qu’il m’a dit ? Je vous le donne en mille, M. Boukrouh. Ce grand meneur d’hommes m’a dit douze mots : Tenez bon mon ami, nous comptons sur vous pour nous remonter le moral.
Hé oui, M. Boukrouh, c’était sur le petit pisse-copie que le grand leader comptait se ressourcer les humeurs. Et le marrant de la chose, c’est que ce n’était pas la dernière fois que j’allais m’entendre dire cela. C’est tout M. Boukrouh. Avant que la classe politique, dans sa grande majorité ne devienne vite oublieuse envers cette presse indépendante, source de tous les maux.
Billet inédit :
A nos lecteurs Le seul billet de Said Mekbel qui n’a jamais été publié. Comme il l’aurait aimé qu’il le soit, nous le donnons in extenso à l’occasion de ce deuxième anniversaire de sa mort. Le manuscrit est en page 12
LE MATIN 03/12/1996