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LA VIE DE MALEK BENNABI (30)‎

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Bennabi ne s’est pas confiné dans une tour d’ivoire pour observer de là-haut la mêlée ‎idéologique apparue en Algérie au lendemain de l’indépendance, au contraire il s’y jette. Il ‎approuve le « Programme de Tripoli » et voit dans « les mesures prises dans le domaine de ‎la réforme agraire, du reboisement, de la prospection minière, une intention de poser le ‎problème du sol ». Il croit même voir un « cycle de civilisation » en marche et écrit dans ‎‎« Le problème de la civilisation » qu’il a achevé en décembre 1963 : « La synthèse de ‎l’homme, du sol et du temps est en train de se réaliser malgré les difficultés inhérentes à ‎une métamorphose sociale à ses débuts. » ‎

Il est motivé, optimiste, volontaire. Il pense pouvoir exercer une influence sur l’orientation ‎idéologique du pays. Il veut de tout son être aider sa patrie à construire ses idées, son ‎infrastructure mentale, sa vision de la lutte contre le sous-développement. Il déploie dans ‎ses écrits son enseignement : la civilisation n’est pas un entassement de produits, la culture ‎n’est pas un programme de loisirs ; le sous-développement n’est pas un manque de moyens ‎mais d’idées… Il cherche à rallier les pouvoirs publics à sa doctrine : rendre l’homme ‎efficace, le temps utile et le sol rentable. ‎

Il est exalté, euphorique. On le voit écrire dans « Le problème de la culture » : « Il faut que ‎toute notre vie soit un beau tableau, un chant mélodieux, un poème exaltant, un mouvement ‎harmonieux et un parfum captivant… L’Algérie doit devenir un chantier de culture, une école ‎où chacun apprend et enseigne, un laboratoire où s’élaborent les valeurs culturelles ‎correspondant aux nécessités du développement, un séminaire où le peuple discute des ‎questions du vrai et du beau, de l’efficace et de l’utile…. » Propos à rapprocher de ceux que ‎Ferhat Abbas a tenus dans son « Testament » de 1945 (« Mon unique ambition a été de voir, ‎avant de mourir, le paysan algérien dormir dans un lit, entre deux draps propres, après avoir ‎dîné et lu son journal »). ‎

Ne se contentant pas d’écrire et de publier, il va porter la bonne parole dans la série de ‎conférences qu’il donne à la salle des Actes en janvier et février 1964 sur les thèmes de la ‎civilisation, de la culture et de l’idéologie. Ces conférences formeront la brochure ‎‎« Perspectives algériennes » (1) préfacée par le Dr Khaldi. ‎

La « Charte d’Alger », document de référence du socialisme algérien, est publiée en mars ‎‎1964. Dans le préambule, une critique vise Bennabi en faisant allusion à « la mystification du ‎terme colonisabilité ». On mesure ainsi combien la blessure a été profonde : le concept de ‎Bennabi a été inconsciemment intégré comme une « acceptation du fait colonial ». Les ‎reproches que lui adressent les intellectuels dits « progressistes » sont plus virulents et ‎méchants que ceux qu’ils adressent au colonialisme lui-même car Bennabi a débusqué ‎le « post-almohadien » en l’Algérien, il lui a enlevé le masque de la victime derrière lequel il ‎se cachait, il l’a dénudé et mis en face de ses responsabilités historiques qu’il a finalement ‎assumées en se libérant.‎

Cette notion n’est toujours pas acceptée dans le monde arabo-musulman. Lors d’un colloque ‎international tenu à l’université de Louvain (Belgique) en 1972 sur la « renaissance arabe », ‎un conférencier français (E. Sicard) a soulevé l’ire des participants quand, citant Malek ‎Bennabi, il parla de « colonisabilité ». ‎

Dans le cadre de ses fonctions de directeur de l’Enseignement supérieur, Bennabi est amené ‎à effectuer des voyages à l’étranger où il est reçu davantage pour ce qu’il est, un penseur, ‎qu’au titre des responsabilités de second plan qu’il occupe. ‎

Il visite l’URSS, l’Indonésie, le Canada, l’Europe et un grand nombre de pays arabes. Il se ‎rend à la tête d’une délégation officielle dont fait partie Khaldi en Chine où il est reçu par le ‎premier ministre Chou En Lai et le président Mao Tsé Toung qui lui relate les péripéties de ‎la longue marche, lui confiant : « Au départ, nous étions 300.000 hommes, et à l’arrivée ‎nous n’étions plus que 20.000. Ce ne sont pas toujours nos ennemis qui nous ont fait subir nos ‎grands revers, mais nos propres erreurs. » ‎

Il ouvre le « Centre d’orientation » nonobstant la non-parution du décret qui devait ‎l’autoriser (2). Il y reçoit le samedi des étudiants francophones et, à partir de 1969, des ‎étudiants arabophones le dimanche. Beaucoup d’étudiants (dont l’auteur de ces lignes) et ‎d’enseignants vont passer par son domicile, de même que d’éminentes personnalités ‎intellectuelles et politiques dont Yasser Arafat, Benoist Méchin, Pierre Rossi, Pierre Bernard, ‎Hubert Nyssen, Lucien Bitterlin, Louis Gardet, Jacques Berque…. Khaldi est extrêmement ‎actif et publie lui-même de nombreux billets dans la presse ; il est chargé du public-relations ‎de Bennabi. ‎

En février 1965, ils sont tous les deux désignés par le gouvernement pour assister au Vatican ‎à l’investiture d’un groupe de cardinaux parmi lesquels Mgr Duval, archevêque d’Alger (3). ‎En mars, il est chargé de diriger la délégation algérienne à la Conférence islamique afro-‎asiatique qui se tient à Bandoeng, et prononce un discours au nom de l’Algérie. Nous avons ‎pu consulter le texte de ce discours, ainsi que le brouillon du « Rapport de la délégation ‎algérienne sur la Conférence islamique afro-asiatique à Bandoeng » écrit de sa main. ‎

La conférence est présidée par le Chef de l’Etat indonésien, Ahmed Soekarno. Dans le texte ‎que Bennabi lit à la tribune officielle, on retrouve ses idées personnelles et des formulations ‎qu’on ne rencontre que rarement dans le langage diplomatique. Il voit dans le monde ‎musulman cette « communauté pour laquelle Dieu a voulu réserver, parmi toutes les autres ‎communautés humaines, le devoir du témoignage ». Citant le verset qui institue ce devoir, il ‎commente : « Si on ne mesurait l’objet de ce Congrès rien que par rapport à la portée ‎morale de ce seul verset et à ses implications sociologiques, cet objet nous apparaîtrait déjà ‎d’une exceptionnelle importance aussi bien sur le plan historique que sur le plan ‎technique. » ‎

Ce n’est pas un discours de circonstance que Bennabi récite, mais des pans de sa pensée ‎qu’il décline devant un parterre réunissant les représentants de tout le monde musulman : ‎‎« Pour aligner le devoir moral et le comportement social du musulman sur cette haute ‎exigence du verset, il faudrait aujourd’hui entreprendre dans l’âme du musulman des ‎transformations qui mobiliseraient les efforts des meilleures intelligences de la génération ‎musulmane actuelle. Car chaque transformation requise comme condition nécessaire pour ‎restituer au musulman seulement une de ses dimensions, celle du témoin, pose un problème ‎technique d’ordre psychologique et social, voire économique. » ‎
Le rapport de mission qu’il rédige à son retour est un exemple de compte-rendu, mené selon ‎un plan clair et précis : Préparatifs de la mission (avec huit alinéas numérotés), Réception ‎‎(entendre accueil à Djakarta), Ouverture de la Conférence (résumé du discours du président ‎Soekarno), Déroulement de la conférence (résumé des interventions des délégués, ‎organisation du travail en commissions, tendances du Congrès, incidents…), Activités de la ‎délégation algérienne, Analyse des travaux de la Conférence, Conclusion. ‎

En avril 1965, le maréchal Tito est en voyage officiel en Algérie. Le gouvernement décide de ‎l’honorer en lui décernant le doctorat honoris causa. C’est Bennabi qui prononce le discours ‎de réception et lui remet le titre en présence de Ben Bella. ‎

Ces activités intenses ne le détournent pas pour autant de son œuvre qu’il poursuit avec le ‎même entrain qu’auparavant. C’est ainsi qu’il nous apprend dans ses Carnets qu’en juin 1965 ‎il est à la page 103 du manuscrit de « Mémoires d’un témoin du siècle », tome 1. ‎

Au lendemain du coup d’Etat du 19 juin 1965 il note dans ses Carnets : « J’apprends que le ‎régime Ben Bella est par terre et que l’armée a pris le pouvoir… Le nouveau pouvoir parait ‎vouloir tirer sa légitimité de la continuité. A l’heure où le pays attend du nouveau, on lui dit ‎qu’on continue l’ancien : le socialisme notamment. C’est la première faute du régime ». Le ‎‎20 juin, il adresse une lettre au « Conseil de la Révolution ». Le 27, il note : « Je viens de ‎terminer la première partie de mes Mémoires que je compte publier en volumes séparés, ‎correspondant aux trois phases de ma vie » (L’Enfant, l’Etudiant, l’Ecrivain). ‎

Le nouveau pouvoir désigne Taleb Ahmed al-Ibrahimi à la tête du ministère de l’Education. ‎Le ministre convoque Bennabi qui note en date du 16 juillet 1965 : « C’était convenu pour ‎‎10h. Quand je suis introduit, Taleb Ahmed reste derrière son bureau. Il ne reçoit pas comme ‎son prédécesseur : il reçoit « officiellement ». Goût du pouvoir ? Vanité ? ». ‎

Aux réunions auxquelles sont régulièrement convoqués les directeurs de l’Enseignement ‎primaire, secondaire et supérieur, le ministre ne lui donne pas la parole, lui cherche ‎querelle et ne rate aucune occasion de l’humilier. Il ne traite pas Bennabi en écrivain, en ‎penseur, en aîné, mais en fonctionnaire subalterne, en auxiliaire. ‎

Perfidement, il le désigne un jour pour le représenter à l’inauguration d’une plaque ‎commémorative dédiée à …. Jean Amrouche. Bennabi confie dans une note du 23 août ‎‎1965 : « Comme si on voulait réserver à l’auteur du « Phénomène coranique » l’honneur de ‎faire l’élégie d’un apostat. Je m’en suis tiré en abordant le problème dans le cadre de la ‎manifestation organisée pour les « chouhadas »…. A la perfidie, j’ai répondu par la ‎perfidie. » ‎
En septembre, le ministre demande qu’on lui retire le véhicule de fonction. ‎

En sus de ses diverses activités, Bennabi a inauguré une collaboration avec l’hebdomadaire ‎‎« Révolution africaine » où tous ses articles ne passent pas. Il est conscient des limites ‎imposées à l’expression de ses idées et note en date du 18 septembre : « Quand j’écrivais ‎sous le règne de Ben Bella, j’étais obligé, pour introduire certaines idées dans le milieu ‎algérien, de les placer sous le parrainage du personnage. J’étais presque obligé de dire que ‎c’était lui qui les avait pensées. C’était l’impôt dû au zaïm, dans le domaine des idées, dans ‎un pays où l’on ne peut pas exprimer ses idées, même en payant cet impôt. D’ailleurs, je le ‎payais aussi au Caire, quand j’étais obligé de dire que toutes mes idées m’étaient inspirées ‎par le zaim des zaims, Nasser. Et aujourd’hui, je suis obligé dans chacun de mes articles que ‎je publie en ce moment dans « Révolution africaine », de parler du 19 juin… Et même à ce ‎prix, toutes mes idées ne passent pas : chaque fois que la critique devient sérieuse, et par ‎conséquent nécessaire et utile, elle est barrée…. » ‎

En novembre, paraît le premier volume de « Mémoires d’un témoin du siècle : l’Enfant ». ‎
En janvier 1966, Taleb Ahmed lui parle de l’enlever de la direction de l’Enseignement ‎supérieur. Il écrit dans une note du 19 janvier 1966 : « Pour le minus habens de Taleb ‎Ahmed, Bennabi est élevé, il faut l’abaisser. » Il le qualifie d’intellectomane, et d’autres ‎noms que nous avons préféré ne pas répéter. ‎

A la fin du mois, Bennabi part pour la seconde fois en mission en Indonésie où il est reçu par ‎Soekarno. A son retour, il commence la rédaction du deuxième volume de ses Mémoires, ‎‎« L’Etudiant ». ‎

En mars, Chérif Belkacem l’informe que Boumediene pense à le nommer ambassadeur au ‎Vatican. Bennabi lui répond que cette désignation ne l’intéresse pas (4). ‎

En mai, il est à Beyrouth où il voit Meskawi et rencontre le Dr. Abdelmadjid qui vient de ‎traduire en arabe le premier volume des « Mémoires d’un témoin du siècle », puis, de là, se ‎rend en Irak où il visite les lieux célèbres de l’histoire matinale de l’islam : Koufa, Nedjef, ‎Kerbala…‎
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A son retour, il note en date du 19 août 1966 : « Le secrétaire général m’apprend que le ‎sieur Taleb Ahmed me remplace à la DES. Et il me propose en échange un poste de ‎conseiller technique. » De fait, Bennabi reçoit bientôt une lettre du ministre lui notifiant son ‎limogeage de la DES. ‎

Il refuse la nouvelle affectation et écrit le 29 septembre au président de la République la ‎lettre que voici : « Un décret vient de mettre fin à mes fonctions à la direction de ‎l’Enseignement Supérieur. Ce n’est pas la moindre anomalie dans ce texte, Mr. Le Président, ‎qu’il ne porte pas votre signature mais semble plutôt, comme vous pouvez vous en rendre ‎compte en jetant un coup d’œil sur le journal officiel, signé par un ministre. En tout état de ‎cause, j’ai conscience d’avoir représenté dignement l’Université algérienne dans le pays et à ‎la face du monde en des circonstances qui marquent dans ses annales, comme elles ‎marquent dans ma propre vie. C’est pour demeurer fidèle à ses traditions que je ne crois pas ‎devoir prendre possession des nouvelles fonctions que je ne saurais remplir dans les ‎conditions où j’y suis appelé. Veuillez agréer… » (5).‎

Le véhicule de fonction lui ayant été retiré, il prend le bus pour ses déplacements. Le 20 ‎août, il dit être à la page 149 du manuscrit du deuxième volume de ses Mémoires. Il est seul ‎à la maison et médite sur sa situation : il a quitté ses fonctions, il craint pour son salaire et ‎son logement, il tremble pour ses filles en bas âge et confie tristement à ses Carnets : ‎

‎« Il y a trente ans à présent que je traverse un drame sans dénouement. Je vis en ce ‎moment, devant la fenêtre de ma chambre à coucher des moments que j’ai vécus dans ma ‎cellule de Chartres, dans une chambre, rue Abdallah Saoud au Caire, sous le figuier de la ‎ferme de l’ALN à Tripoli, quelques semaines avant mon retour en Algérie. Pendant que mes ‎doigts égrènent le chapelet, mon esprit égrène les contradictions de mon destin. Pendant les ‎trente années que j’ai vécues depuis la fin de mes études, le colonialisme a voulu détruire en ‎moi les germes de mes idées. Il n’y a pas réussi : mes idées circulent aujourd’hui dans le ‎monde musulman, comme la semence de demain (c’est nous qui soulignons). Moi-même, ‎j’ai appelé de toute la force de mon âme la mort pour me délivrer d’un fardeau qui m’a ‎parfois écrasé. Je n’ai pas réussi, et je vis en ce moment peut-être l’épisode le plus tragique ‎de ma vie parce que je ne vois qu’une seule porte de sortie de l’enfer où je vis : la mort. Or, ‎elle ne vient pas. Et je me sens extrêmement fatigué, extrêmement à bout… Ah ! mort des ‎simples mortels ! Que ne viens-tu ce soir ? ». ‎

Pris en sandwich dans cet immeuble de trois étages où il habite entre des voisins de dessus ‎et de dessous fort incommodants, les plaintes qu’il dépose pour tapage nocturne et bruits ‎permanents n’aboutissent pas. On lui coupe fréquemment l’eau, l’électricité, le téléphone. Il ‎pense qu’on veut le priver de sommeil, ainsi que des nécessités de la vie pour l’empêcher de ‎travailler au parachèvement de sa pensée et à sa transmission aux étudiants qui viennent à ‎ses séminaires. ‎

Il apprend même un jour que son logement a été affecté à un tiers. Il n’en peut plus et ‎adresse une lettre comminatoire au président Boumediene où on peut lire : « Les ‎manœuvres auxquelles je suis en butte depuis mon retour en Algérie indépendante et les ‎mesures qui m’ont touché ont leur source à l’étranger. Et en particulier, ma longue ‎expérience qui est je crois unique en Algérie dans le domaine de la lutte idéologique, de son ‎esprit et de ses moyens, ne pouvait laisser place à l’étonnement si les enquêtes que j’ai ‎demandées avaient eu lieu : elles ne pouvaient avoir lieu… Depuis deux ans, depuis un an, de ‎nouveaux crimes sont passés que j’ai renoncé à porter à la connaissance de qui de droit. J’en ‎viens au dernier. Aujourd’hui, le service de l’habitat qui avait installé voici cinq ans à la ‎demande du juif Sydney Nathan une maison de tolérance sous mon appartement, vient de ‎me signifier qu’il installe sous mon toit même un locataire… » Signe qu’il est à bout de toute ‎résistance nerveuse il écrit ces lignes étonnantes : « Conscient de la gravité et de la ‎solennité de mon acte, je me trouve engagé –si cette infâme mesure n’est pas rapportée ‎dans les 24 heures- que je proclamerais le Djihad en tout lieu et en toute circonstance où je ‎pourrais le faire, jusqu’à ce que le sionisme me fasse abattre ou arrêter par )ses ‎mandataires en Algérie. Veuillez agréer… » ‎

Le 19 août 1966, il envoie une lettre à Chérif Belkacem où il écrit : « Je me suis rendu ‎compte que ni Si Boumediene ni vous-même ne vous rendez compte du degré de ‎pourrissement dans l’administration même, et je dirais surtout dans l’appareil de sécurité. » ‎

Le 10 septembre, Sayyed Qotb (1906-1966) est pendu au Caire. Bennabi note : « Cette belle ‎figure du mouvement des « Frères musulmans » n’est plus. Les bourreaux qui l’ont exécuté ‎ne se doutent pas qu’ils ont libéré aussi le souffle qui deviendra bientôt une tempête au-‎dessus de leur tête : la tempête qui les emportera. » ‎

NOTES :‎

‎1) Ed. En-Nahda, Alger 1964.‎

‎2) Dans un article intitulé « Défense du capital-idées » (« Révolution africaine » du 24 avril 1968), Bennabi ‎rappelle sur un ton excédé qu’il a « été rappelé de l’étranger par le gouvernement algérien pour constituer un ‎Centre d’orientation culturelle », avant d’ajouter : « Je l’ai constitué effectivement dans le petit coin où je suis. Il ‎fonctionne depuis quatre ans. Son programme figure dans le dossier de présentation du décret portant création ‎qui n’a pas encore paru au journal officiel… ».‎

‎3) A la mort de Bennabi, le cardinal Duval enverra une lettre à sa veuve où il salue « la hauteur de ses pensées, la ‎délicatesse de son cœur et l’ouverture de ses sentiments », ajoutant : « Il croyait fortement au dialogue entre ‎musulmans et chrétiens. Je n’oublierai jamais qu’il est venu à Rome comme délégué du gouvernement, avec le ‎regretté Dr. Khaldi, pour mon cardinalat et que, à cette occasion, il a été reçu par Paul VI. Depuis lors, une parenté ‎spirituelle s’était établie entre nous. » ‎

‎4) En revanche, il postulera sans succès en 1969 pour une ambassade dans un pays arabe (Beyrouth ou le ‎Caire).‎

‎5) Dans une autre lettre au président Boumediene datée du 17 février 1968, il écrit : « Le pouvoir parallèle est ‎parvenu à mettre fin à mes fonctions à la direction de l’Enseignement Supérieur parce que ma présence à cette ‎direction gênait les manœuvres de toutes sortes contre la promotion des cadres attendus par le pays. » ‎

Ces éclairages démentent la version selon laquelle Bennabi a démissionné de ses fonctions de directeur de ‎l’Enseignement supérieur. Il n’en aura pas d’autres. L’Etat algérien l’aura donc employé en tout et pour tout ‎moins de trois ans. ‎

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