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LES PEUPLES QUE LE BENDIR RASSEMBLE ET QUE LE GOURDIN DISPERSE

by admin

‎« Dans la nature rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme » a dit Lavoisier. Il en ‎est à peu près de même pour les idées, elles ne disparaissent pas. Il en est qui se ‎transforment pour s’adapter aux nécessités de la vie, devenant des motivations exaltantes et ‎des institutions au service du bonheur des hommes et de l’harmonie entre eux, et d’autres ‎qui, tels les virus, mutent à la recherche de nouvelles conditions propices à leur survie pour ‎continuer de sévir contre le bonheur des hommes et l’harmonie entre eux au nom de ‎quelque cause « transcendantale ». Elles se nichent dans le double-fond des mentalités, ‎attendant le moment où la rationalité recule et où les mesures prophylactiques s’étiolent ‎pour reprendre leur œuvre corrosive.‎

Contrairement à ce que l’on croyait, le maraboutisme qui a prospéré dans notre société ‎entre le XVe siècle et la célébration en 1930 du centenaire de la colonisation de l’Algérie n’a ‎pas disparu dans la nature sous l’action éradicatrice des « oulamas » algériens qui s’est ‎étalée sur un demi-siècle. Voyez avec quelle rapidité il est revenu ces dernières décennies, ‎et avec quelle facilité il s’est réincarné dans le charlatanisme qui se cache derrière ‎l’islamisme.

Notre pays a livré une grande guerre de libération, reconquis sa souveraineté au prix de ‎lourds sacrifices, dépensé un millier de milliards de dollars depuis l’Indépendance pour se ‎moderniser, dont une grande partie a été destinée à l’éducation – en vue de former « ‎l’Algérien moderne » –

MAIS FINALEMENT IL SE RETROUVE RAMENE AUX PERIODES LES ‎PLUS OBSCURES DE LA DECADENCE DU MONDE MUSULMAN ET DE LA COLONISATION ‎QUI AVAIT FAIT DU MARABOUTISME UN AUXILIAIRE BENEVOLE. CE QUE NOUS PENSIONS ‎ETRE DES AVANCEES IRREVERSIBLES S’EST AVERE ETRE DE COUTEUX ET VAINS COUPS ‎D’EPEE DANS L’EAU. ‎

LE MARABOUTISME A FAIT UN EXTRAORDINAIRE SAUT EN HAUTEUR PUISQU’IL A ‎ATTEINT LES SPHERES DIRIGEANTES DU PAYS, ET SON AVATAR, L’ISLAMISME POLITIQUE – ‎CHAUSSE DES BOTTES DE SEPT LIEUES – A FAIT UN GIGANTESQUE SAUT EN LONGUEUR ‎PUISQU’IL COUVRE DESORMAIS UNE GRANDE SURFACE DE LA SOCIETE. EN FAIT ‎L’ISLAMISME N’EST PAS L’HERITIER DU MARABOUTISME, IL EN EST UNE DUPLICATION, ‎UN CLONE. ILS SONT DESORMAIS DEUX, DEUX ENTITES VIRALES, DEUX FLEAUX A ‎PRENDRE EN TENAILLES LA SOCIETE ALGERIENNE JUSQU’A SA STERILISATION DEFINITIVE, ‎JUSQU’A SA TALIBANISATION.

TOUT DOIT ETRE REFAIT UN JOUR, A MOINS QUE L’ALGERIE NE LEUR AIT PAS SURVECU ‎PARCE QU’ELLE SERAIT DEVENUE QUELQUE CHOSE COMME LA SOMALIE OU ‎L’AFGHANISTAN, CE QUI N’EST PAS IMPOSSIBLE. Surtout si le pétrole venait à nous lâcher ‎prématurément, ce qui n’est pas non plus impossible
.‎
LA SEULE DIFFERENCE ENTRE L’ISLAMISME CHARLATAN CONTEMPORAIN ET LE ‎MARABOUTISME MUSULMAN D’AUTREFOIS EST QUE CE DERNIER N’ETAIT PAS ‎SANGUINAIRE. IL N’EGORGEAIT PAS LES GENS, IL SE CONTENTAIT DE LES DECERVELER, ‎DE TUER EN EUX LA RATIONALITE, TANDIS QUE LE PREMIER AIME A CUMULER LES DEUX ‎QUAND IL LE PEUT. DE CONCERT, ILS ONT REUSSI A RECONSTITUER DE HAUT EN BAS ‎PARMI LES GOUVERNANTS ET LE PEUPLE LE PUBLIC ASSOIFFE DE SACRE DONT ILS ONT ‎BESOIN POUR EXERCER LEUR APOSTOLAT DOUTEUX. ILS ONT RESTAURE L’AMBIANCE ‎ENVOUTANTE PROPICE A LEURS BONIMENTS EN MEME TEMPS QU’A TOUTES LES ‎ESCROQUERIES ET RETABLI LES PRATIQUES DE SORCELLERIE COMME LA « ROQIA ».‎

A l’époque de Ben Badis de larges couches de la population, béant de crédulité devant ce ‎qu’on leur racontait, guettant la survenance de quelque miracle et suivant comme des ‎moutons les processions maraboutiques, révéraient les « sidi », les «moulay» et les « ‎chouyoukh » dispensateurs de baraka. Elles buvaient leurs paroles comme de l’eau bénite et ‎recueillaient les poils de leur barbe, quand ils en avaient, comme des reliques. ‎
C’EST CE PUBLIC QUE BEN BADIS A QUALIFIE UN JOUR DE « PEUPLE QUE RASSEMBLE LE ‎BENDIR ET QUE DISPERSE LE GOURDIN ».

Public mêlant pêle-mêle amateurs de « bkhour » ‎et de » djawi », « tolba » guérisseurs de l’âme et du corps, émules entrant en transe au ‎rythme endiablé du bendir et charmeurs de serpents comme ceux qu’enfant j’allais voir sur ‎la place de la Régence (actuelle place des Martyrs).

Il y en avait partout, passant dans les villes, les quartiers et les villages, Blancs ou Noirs, ‎enjôleurs ou louches, en burnous ou en gandoura, exhibant devant les foules émoustillées ou ‎émerveillées tambours, bendirs, karkabous et moult objets fétiches hérités de l’ère ‎ottomane ou provenant de la mythique Tombouctou.‎

Parfois, la pensée est obligée de créer des mots nouveaux pour cerner des phénomènes ‎nouveaux. C’est ainsi qu’il nous faut un nouveau terme pour caractériser la situation créée ‎par les révolutions arabes, je veux dire la victoire en chaîne de l’islamisme et l’engouement ‎communicatif qu’elle a suscité, notamment en Algérie. « L’islamismania » est celui qui ‎semble convenir pour rendre compte de cet engouement endémique. On pensait que le ‎gourdin de Moubarak avait assommé les islamistes et que celui de Ben Ali les avait dispersés ‎aux quatre vents. Or voilà que l’islamismania les a rameutés. ‎

IRONIE DU SORT, CE SONT LES « GENERATIONS INTERNET » QUI ONT SONNE LE ‎RASSEMBLEMENT ET LEUR ONT FRAYE LA VOIE, QUI ONT OUVERT LA BOITE DE PANDORE ‎ET RAMENE ALADIN (EN LA PERSONNE DE TEL OU TEL LEADER) LA LAMPE MERVEILLEUSE ‎A LA MAIN ET PROMETTANT DE FAIRE RETROUVER LA VUE A LEUR PEUPLE PLONGE ‎DANS LA CECITE DE LA « DJAHILIYA DU XXE SIECLE » SELON L’EXPRESSION DE ‎SAYYEDQOTB.

LE MONDE ARABE S’EST MIS AU VERT, AU SENS PROPRE ET FIGURE DU TERME. ÇA SENT ‎PARTOUT LE « SWAK », LE HENNE ET L’AMBRE. EN SE CLONANT EN ISLAMISME, LE ‎MARABOUTISME S’EST MODERNISE. IL A GAGNE EN RELIGIOSITE OSTENSIBLE ET PERDU ‎EN FOLKLORE RIDICULE. ‎

Le bendir a été remplacé par l’islamismania et, à la place du spectacle des charmeurs de ‎serpents confinés à la place Djamaa-l-fna (Marrakech) pour amuser les touristes européens, ‎les chaînes de télévision des monarchies arabes offrent aux pieux téléspectateurs de ‎nouveaux produits de marketing religieux comme l’activité lacrymale interactive promue ‎par l’inimitable Amr Khaled.‎

Dans son œuvreة‎ Bennabi considère que la civilisation islamique a été déviée de sa ‎trajectoire en l’an ‎‏37‏‎ de l’Hégire, l’année de l’affrontement entre Muawiya et Ali. Pour lui la ‎‎« phase de l’âme » venait de s’achever, laissant place à la « phase de la raison » qui s’est ‎prolongée jusqu’à l’époque d’Ibn Khaldoun, puis à celle de la décadence qu’il est mort sans ‎la voir se clore.

IL VOULAIT DIRE PAR LA QUE LA CIVILISATION ISLAMIQUE N’ETAIT PLUS DEPUIS LORS ‎QU’UN VAISSEAU QUI AVAIT PERDU SON PLAN DE VOL AU DECOLLAGE AVANT ‎D’ACHEVER SA COURSE UN MILLENAIRE PLUS TARD DANS LE MARABOUTISME.

Il propose à notre réflexion un exemple très concret : « L’effort intellectuel, c’est-à-dire ‎l’effort créateur d’idées, a été placé par l’islam au premier rang de ses recommandations ‎par ce hadith du Prophète : « Quiconque fait un effort intellectuel et parvient à une vérité a ‎un double mérite, et quiconque fait un effort et est parvenu à une erreur a quand même un ‎mérite ». Voilà un archétype qui a guidé les efforts des premières générations de l’islam ‎dans ces conquêtes de l’esprit qui ont enrichi le patrimoine humain dans le domaine de la ‎pensée pure, comme dans le domaine des sciences appliquées. Mais, quelques siècles au-‎delà, nous trouvons la société musulmane en possession d’une nouvelle philosophie de ‎l’effort intellectuel. Nous trouvons, à vrai dire, son comportement totalement changé à ‎l’égard des idées comme l’indique ce précepte que les dernières générations nous ont ‎transmis : «Tafsirouhoukhata’, wakhata’ouhoukofr» (L’interpréter, en parlant du Coran, est ‎une erreur, et toute erreur est blasphème).

Et Bennabi de poursuivre : « Voilà une idée qui constitue une défense qui a effectivement ‎paralysé tout effort intellectuel dans le monde musulman où toute spéculation a eu en effet ‎à la base une idée coranique, comme les spéculations de l’école mu’tazilite qui a tant enrichi ‎la pensée musulmane. L’école réformiste, depuis Abdou, a eu vaguement conscience que ‎l’esprit musulman s’était enlisé dans cette ornière. Mais pour l’en tirer il fallait soit lui ‎donner une nouvelle impulsion spirituelle, comme Luther et Calvin en Europe, soit lui faire ‎subir une révolution intellectuelle comme Descartes, c’est-à-dire lui donner, d’une manière ‎ou d’une autre, un nouvel élan créateur d’idées. L’école réformiste n’a su faire ni cette ‎réforme ni cette révolution. Elle est tombée elle-même dans l’ornière, tout en criant que ‎nous sommes dans l’ornière ».‎

L’ESPRIT MUSULMAN CONTINUE DE TOURNER EN ROND, PRISONNIER D’UNE GRAVITE ‎QUI LE FAIT TOURNER AUTOUR D’UN ASTRE MORT, CELUI DE LA DECADENCE. LE ‎MARABOUTISME, COMME LE MODE DE PENSEE ET LE MODELE DE SOCIETE PRONES PAR ‎L’ISLAMISME, DESCENDENT EN DROITE LIGNE DE L’ATTITUDE « INTELLECTUELLE » ‎SUGGEREE PAR CE PRECEPTE. COMBIEN DE FOIS NE L’A-T-ON ENTENDU DANS LA ‎BOUCHE DE ULEMAS MOYEN-ORIENTAUX ET MOYENAGEUX, OU DE LEADERS ISLAMISTES ‎ALGERIENS ?‎

EN DEHORS DU VOLET TOUCHANT AUX MŒURS, QUE SAIT-ON DE LA « SOLUTION ‎ISLAMIQUE » ? RIEN, SINON QU’ELLE SE PREVAUT DES SUCCES DE LA MALAISIE OU DE ‎L’AKP ALORS QUE CELUI-CI, COMME ON L’A MONTRE DANS DE PRECEDENTES ‎CONTRIBUTIONS, RESULTE DES GARDE-FOUS POSES PAR LA LAÏCITE, DE L’APPLICATION ‎DES REGLES DE L’ECONOMIE DE MARCHE ET DES CRITERES DE CONVERGENCE IMPOSES ‎PAR LA PERSPECTIVE D’ADHESION A L’UNION EUROPEENNE.

Si l’islamisme turc n’avait pas été soumis à ces pressions, il aurait probablement versé dans ‎le charlatanisme et l’extrémisme quand on sait que Teyyip Erdogan a failli être happé par ‎cette spirale à un moment de sa vie.

Ayant été dans sa jeunesse à une école de formation des imams – avant de bifurquer plus ‎tard vers des études économiques – il n’était pas loin de devenir un taliban. Alors qu’il était ‎maire d’Istanbul (de 1994 à 1998) il a été mis fin à son mandat et lui jeté en prison parce ‎qu’il avait lu en public un poème d’un auteur turc qui disait : « Les minarets seront nos ‎baïonnettes, les dômes des mosquées nos casques, les lieux de prière nos casernes, et les ‎croyants nos soldats ».‎

L’islamisme considère que l’islam est une seule et même chose depuis son apparition. Mais ‎si l’islam est un, pourquoi l’islamisme est-il pluriel ? Pourquoi autant de partis en Algérie et ‎en Égypte si la vérité que chacun prétend détenir est une seule ? La différence est-elle dans ‎le « programme » ou dans les hommes qui le véhiculent ? Or, on sait qu’il n’y a pas de ‎programme islamiste.

LA CAUSE DU PEUPLE PALESTINIEN A PERDU SA PREEMINENCE DANS L’ESPRIT DES ‎PEUPLES QUI LA SOUTENAIENT DEPUIS QUE LE PEUPLE PALESTINIEN A ETE DIVISE EN ‎MUSULMANS ISLAMISTES ET EN MUSULMANS TOUT COURT (SANS OUBLIER LES ‎CHRETIENS). ELLE S’EST SCINDEE EN DEUX ETATS AVANT MEME QUE L’ETAT PALESTINIEN ‎NE NAISSE. SOUS PRETEXTE DE « RESISTANCE », L’ISLAMISME L’A DIVISEE EN DEUX ‎SOUS-CAUSES ANTAGONIQUES, L’UNE DOMICILIEE A GAZA, L’AUTRE A RAMALLAH, SOUS ‎L’ŒIL VIGILANT DE TSAHAL. QUI POUVAIT, EN ISRAËL, REVER D’UN TEL SCENARIO, D’UN ‎TEL CADEAU ?

Le monde s’en est détourné et le gouvernement israélien en a profité pour grignoter ‎davantage de territoires, jusqu’au jour où il n’y aura plus de Palestine du tout. Restera ‎l’islamisme qui, faute de terre, planera majestueusement sur les eaux du Jourdain ou de la ‎Méditerranée comme l’Esprit saint au début de la Création.

J’ai parlé dans un écrit antérieur de « chariâland », un autre néologisme qui m’a été inspiré ‎par l’actualité arabe. Gaza n’en est-il pas un modèle ? N’y sont admis que les musulmans ‎palestiniens islamistes. Les autres, musulmans tout court ou chrétiens, n’ont qu’à aller se ‎faire pendre ailleurs.

DANS L’ALGERIE COLONIALE, IL Y AVAIT UN PLURALISME POLITIQUE ET UNE VIE ‎ELECTORALE. EUT-IL PU Y EXISTER DES PARTIS ISLAMISTES POUR CONCURRENCER LE ‎PPA-MTLD ET L’UDMA ? NON, CAR L’ISLAMISME N’EXISTAIT PAS ENCORE, IL N’EST ‎APPARU QU’A L’ERE DES INDEPENDANCES POUR S’OCCUPER DE LA FEMME, DE LA ‎MIXITE, DU MAILLOT DE BAIN, DES SALLES DE PRIERE SUR LES LIEUX DE TRAVAIL, DE ‎L’INTERET BANCAIRE ET AUTRES QUESTIONS « MAJEURES » RESTEES INSOLUBLES DEPUIS ‎L’APPARITION DE L’HOMO SAPIENS. C’EST CELA SON PROGRAMME.

Mais maintenant qu’il est bien installé, que l’islamismania va rassembler encore plus de ‎gens autour de lui qu’il ne sera pas possible de disperser avec le gourdin, devra-t-il s’inspirer ‎du Hamas pour séparer musulmans islamistes et musulmans ordinaires (sans parler du sort ‎à faire à la minorité chrétienne en voie d’expansion) quand il ne sera plus possible de vivre ‎ensemble ? Ou aura-t-il besoin de l’expertise israélienne ?

Et dans la pauvre Égypte bien plus mal lotie que nous, où iraient les 15% de musulmans qui ‎n’ont pas voté islamiste et les 10% de Coptes ? Faudrait-il la diviser par trois ? Le Soudan, lui, ‎n’a pour l’heure été divisé que par deux pour cause d’islamisme. Comme le morceau de ‎gruyère arraché par Yasser Arafat au temps de Clinton et de Rabin.

TOUT LE MONDE CONNAIT L’ARGUMENT UTILISE PAR DES GENERATIONS DE « SAVANTS ‎‎» ET INTELLECTUELS MUSULMANS : ON PEUT SE DEVELOPPER SANS RIEN CHANGER A SA ‎CULTURE ET A SA PERSONNALITE, ET LA MEILLEURE ILLUSTRATION EN EST LE JAPON. OR, ‎UN SPECIALISTE JAPONAIS DU MONDE ARABE VIENT D’APPORTER LA REPONSE DES ‎JAPONAIS A L’IMPARABLE ET LUMINEUX ARGUMENT.

Il s’agit de Nobouaki Notohara, un nippon arabisant qui a passé quarante ans de sa vie dans ‎la péninsule arabique et traduit plusieurs livres de l’arabe au japonais. Il a publié il y a ‎quelques années un livre intitulé « Les Arabes : point de vue japonais » où il écrit :

‎« A chaque fois que des Arabes se rencontrent à un colloque scientifique et que le Japon est ‎mentionné, les participants comparent le renouveau japonais au renouveau arabe tant ‎espéré. Ils affirment que le Japon a réussi à intégrer le nouvel âge tout en préservant sa ‎culture. Il semblerait qu’ils cherchent ainsi à se trouver des excuses, à se justifier en disant : ‎‎“On peut intégrer l’âge de la modernisation, de la mondialisation et de la production sans ‎pour autant renoncer à son héritage social, au modèle politique traditionnel, aux normes ‎comportementales qui ne sont plus de mise aujourd’hui ”. Et si on leur répond que les ‎Japonais ont intégré l’époque moderne parce qu’ils ont renoncé au modèle politique et au ‎comportement social auxquels ils étaient habitués et qu’ils ont adopté de nouvelles idées, ‎certains Arabes réagissent avec stupéfaction, refusant d’admettre les faits… Au Japon, ‎chaque jour apporte son lot de faits nouveaux, alors que l’Arabe se contente de reconstruire ‎les évènements du lointain passé…»‎

L’ISLAM EST LA RELIGION QUI ETAIT LA MIEUX DISPOSEE POUR PROMOUVOIR UNE ‎PHILOSOPHIE POLITIQUE DEMOCRATIQUE. POURTANT LES PEUPLES QUE RASSEMBLE LA ‎CULTURE THEOCRATIQUE ET QUE DISPERSE LE GOURDIN LUI ONT PREFERE LE ‎DESPOTISME, C’EST-A-DIRE LE REGNE DES PERSONNES PLUTOT QUE CELUI DES ‎INSTITUTIONS.

LA MONARCHIE HEREDITAIRE ETAIT ETRANGERE AUSSI BIEN A LA DOCTRINE ISLAMIQUE ‎QU’A L’HISTOIRE DES ARABES. IL N’EXISTAIT PAS DE MONARQUES DANS L’ARABIE ‎PREISLAMIQUE QUI ETAIT PLUTOT UNE « REPUBLIQUE DE MARCHANDS » OU ‎COHABITAIENT DES TRIBUS ET DES FAMILLES MAIS SANS STRUCTURE UNITAIRE OU ‎AUTORITE AU-DESSUS D’ELLES. POUR SA PART, LE PROPHETE N’A NI INSTITUE LA ‎MONARCHIE NI DESIGNE UN SUCCESSEUR, IL A LAISSE AUX MUSULMANS LE SOIN DE LE ‎FAIRE SELON CE QUI LEUR CONVIENDRAIT. IL N’A NI USE DE LA CULTURE THEOCRATIQUE, ‎NI DU GOURDIN. ‎

POURTANT, QUAND ON REGARDE LE BILAN, LE DESPOTISME EST LE SEUL MODELE ‎POLITIQUE QUE LES ARABO-MUSULMANS ONT CONNU TOUT AU LONG DE LEUR ‎HISTOIRE. CE QUI ETAIT AU DEPART UNE HERESIE EST DEVENU UNE ORTHODOXIE. LE ‎DESPOTISME A SI BIEN ETE MOULE DANS L’ARGILE DES CROYANCES QU’IL N’A PAS ETE, A ‎CE JOUR, INQUIETE DANS LES MONARCHIES QUI SE VEULENT DE DROIT DIVIN. ‎

Autre ironie du sort, ce ne sont pas les républiques qui ont été les plus fervents soutiens des ‎révolutions arabes, mais les monarchies, pour les raisons géostratégiques que l’on devine et ‎non par conviction démocratique, bien sûr. Et que feraient les islamistes s’ils savaient qu’on ‎les laisserait faire ? Le califat.‎

En cherchant un jour à vérifier un détail dans la Constitution américaine pour les besoins ‎d’un travail, j’ai été saisi par la similitude entre le principe posé dans la Déclaration ‎d’indépendance américaine en vertu duquel les citoyens ont le droit de se soulever contre le ‎despotisme, et le principe posé par Abou Bakr le jour où il a prêté serment comme ‎successeur du Prophète, fondant le même droit. Il n’y a de différence que dans la ‎formulation, autrement le fond est absolument identique. Et les deux moments, la ‎Déclaration d’indépendance, comme le discours d’investiture, étaient des moments ‎fondateurs.‎

On lit en effet dans le troisième paragraphe de la Déclaration d’indépendance : « Les ‎gouvernements sont établis parmi les hommes pour garantir (ces) droits, et leur juste ‎pouvoir émane du consentement des gouvernés. Toutes les fois qu’une forme de ‎gouvernement devient destructive de ce but, le peuple a le droit de la changer ou de l’abolir ‎et d’établir un nouveau gouvernement… Il est de son droit, il est de son devoir de rejeter un ‎tel gouvernement…»‎

Et comme pour donner aux citoyens américains les moyens de mettre en œuvre ce principe ‎le Deuxième amendement a institué le droit pour eux de détenir et de porter des armes. Les ‎Américains, n’ayant pas connu depuis leur guerre de libération le despotisme, n’ont pas eu à ‎recourir au soulèvement contre lui. De ce vieux principe est restée la liberté du port d’arme ‎malgré les problèmes qu’elle pose à la société américaine. ‎

Après sa désignation comme premier calife Abou Bakr a déclaré devant ceux qui venaient ‎de l’élire : « Me voici chargé de vous gouverner. Si j’agis bien, soutenez-moi, si j’agis mal, ‎corrigez-moi. Dire la vérité au dépositaire du pouvoir est un acte de dévouement, la lui ‎cacher est une trahison… » Quelqu’un parmi la foule prit la parole et s’écria en levant haut ‎son sabre : « Si tu agis mal, c’est avec ceci que nous te redresserons ! » N’est-ce pas la ‎même philosophie politique qui est à la base du texte américain et du discours du premier ‎calife ? La réponse apportée par le bédouin pour compléter le principe posé par Abou Bakr ‎n’est-elle pas l’égale du Deuxième amendement légitimant le recours aux armes pour ‎combattre un pouvoir devenu illégitime ?

POURQUOI LES CHOSES ONT-ELLES BIEN MARCHE DANS LE CAS DES AMERICAINS ET PAS ‎DANS CELUI DES MUSULMANS ? PARCE QU’UN QUART DE SIECLE APRES L’ENONCE DE CE ‎PRINCIPE LE GOUVERNEUR DE DAMAS, MUAWIYA (FONDATEUR DE LA DYNASTIE ‎OMEYYADE) A RENVERSE LE CALIFE LEGITIME, ALI, ET INSTAURE LE CALIFAT HEREDITAIRE ‎SANS QUE LE PEUPLE NE SE SOULEVE, NI QUE LES ULEMAS NE LE CLOUENT AU PILORI. ‎AU CONTRAIRE, ILS SE SONT INGENIES A LEGITIMER LE GOURDIN ET SA TRANSMISSION ‎HEREDITAIRE.

DEPUIS, LES PEUPLES QUE RASSEMBLE LE BENDIR ET QUE DISPERSE L’EPEE D’AL- ‎HADJADJ ONT FAIT LEUR ENTREE DANS L’ERE ININTERROMPUE DU DESPOTISME SOUS ‎TOUTES SES DECLINAISONS : CALIFAT DYNASTIQUE, MONARCHIES, PRESIDENCE A VIE, ‎REPUBLIQUES HEREDITAIRES…

AUTRE QUESTION : POURQUOI LES MUSULMANS, SI SENSIBLES A L’IDEE DE « SALAF » ‎QUI A DONNE SALAFISME (IMITATION DES ANCIENS) ONT-ILS SUIVI L’EXEMPLE DE ‎MUAWIYA PLUTOT QUE CELUI D’ABOU BAKR ? PARCE QUE LES ULEMAS ET FOUQAHA ‎ONT ESCAMOTE LE PRINCIPE DEMOCRATIQUE PAR CRAINTE DU GOURDIN OU POUR LUI ‎COMPLAIRE EN ECHANGE DE LEUR PREROGATIVE DE RASSEMBLER LE PEUPLE, ET ‎REMPLACE PAR UN AUTRE, TIRE DU DETOURNEMENT DE SENS DE PAROLES COMME : « ‎OBEIR AU DETENTEUR DU POUVOIR, C’EST OBEIR A DIEU ». ILS ONT FAIT AVEC LE CORAN ‎ET LE HADITH CE QUE LES DESPOTES ONT FAIT AVEC LEURS CONSTITUTIONS.

‎« Le Soir d’Algérie » du 26 février 2012‎

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