Les révolutions arabes n’ont ni avorté ni été volées, elles ont juste constitué un effet d’aubaine pour ceux qui guettaient depuis plusieurs décennies l’occasion de sortir de derrière les fagots.
Ce qui arrive aux Arabes n’est ni un printemps, ni un hiver, ni quelque chose d’autre qui peut être exprimé par les particularités d’une saison. Ils entrent tout simplement dans un Nouvel Âge qui est le moment tragique et exaltant à la fois où on tranche les dilemmes cornéliens et les nœuds gordiens.
Ce que n’ont pas fait les penseurs modernistes, les ulémas ou les hommes politiques au siècle dernier, les peuples vont devoir le faire en taillant à vif dans leur chair.
De toute façon, c’est comme ça qu’ont fait les autres nations.
Les révolutions ne se sont pas terminées dans les pays où on a voté et donné la majorité absolue ou relative au courant islamiste, elles s’étendront à plus ou moins long terme à d’autres pays arabo-musulmans et même au-delà, en Afrique et en Asie. Il y aura peut-être une pause pendant laquelle les pays où il ne s’est rien produit vont observer les conséquences de l’arrivée des islamistes au pouvoir.
Le premier acte des révolutions arabes a été le soulèvement des peuples dans plusieurs pays en même temps, le deuxième la chute du régime, et le troisième les élections. Le quatrième sera celui de la mise au banc d’essai de l’islamisme.
La nouveauté ce n’est pas qu’il soit arrivé au pouvoir, il l’est depuis toujours dans les monarchies du Golfe, et il l’a fait dans les temps récents en Iran et en Afghanistan. Dans ces pays il s’exerçait dans un cadre absolutiste, ne tolérant pas d’opposition.
La nouveauté c’est qu’avec les révolutions arabes il va s’exercer dans un cadre ouvert, dans une ambiance de liberté d’expression, avec des partis concurrents et des médias libres. De ce point de vue, la victoire des islamistes aux élections en Tunisie, au Maroc et en Égypte est une excellente chose. Les peuples qui se sont libérés sont devant un test espéré, redouté ou différé depuis les indépendances.
Le moment est venu de faire face à la situation quels que soient les périls encourus. Maintenant que le « âfrit » a jailli de la boîte et qu’il se trouve intramuros, il faut lui faire face. C’est la grande épreuve qui les attendait et à laquelle ils ont échappé jusqu’ici pour une raison ou une autre.
IL VAUT MIEUX CREVER L’ABCES UNE FOIS POUR TOUTES ET AFFRONTER LE PROBLEME, SI PROBLEME IL Y A, PLUTOT QUE DE CONTINUER A LE RENVOYER AU LENDEMAIN OU A VIVRE AVEC UNE EPEE DE DAMOCLES SUR LA TETE.
LE MOMENT EST VENU DE LEVER L’HYPOTHEQUE ISLAMISTE EN DONNANT AUX PARTIS QUI S’EN RECLAMENT L’OCCASION DE MONTRER CE DONT ILS SONT CAPABLES. S’ILS DEMONTRENT QU’ILS SONT RESPECTUEUX DES LOIS REPUBLICAINES, QU’ILS N’ENGAGERONT PAS LEURS PAYS SUR DES CHEMINS AVENTUREUX A LA RECHERCHE DE QUELQUE CHIMERE, QU’ILS TIENDRONT LEURS PROMESSES D’APPORTER LA JUSTICE ET LA PROSPERITE, ALORS ILS GOUVERNERONT AUSSI LONGTEMPS QUE LE VOUDRA LE SUFFRAGE POPULAIRE.
MAIS S’ILS ECHOUENT A AMELIORER LE SORT DE LEURS COMPATRIOTES OU S’ILS PORTENT ATTEINTE AUX LIBERTES NOUVELLEMENT CONQUISES, ALORS ILS SERONT CHASSES DE LA SCENE POLITIQUE SINON PAR UNE REVOLUTION, DU MOINS PAR UN DESAVEU ELECTORAL.
Les pays concernés passeront peut-être par une période d’instabilité, de tensions, voire de violence, mais s’il faut en passer par là ils gagneront à le faire le plus tôt possible.
LORSQUE LA MISE A L’EPREUVE DE L’ISLAMISME AURA ETE MENEE A SON TERME, SES EFFETS, QU’ILS SOIENT POSITIFS OU NEGATIFS, LIBERERONT L’ESPRIT MUSULMAN, ET C’EST DE CETTE LIBERATION QUE DATERONT LES EFFORTS REELS ET PROFONDS D’ADAPTATION DE L’ISLAM AU MONDE MODERNE.
Si les nouveaux gouvernements déçoivent leurs peuples, l’islamisme disparaîtra de l’esprit des gens comme panacée capable de remédier aux problèmes des musulmans.
S’ils réussissent à enclencher une dynamique de développement et de montée en puissance dans le monde comme le fait depuis quelques années l’AKP, ce sera parce qu’ils auront fait comme l’AKP. OR, CELUI-CI A REUSSI PARCE QU’IL EVOLUAIT DANS LE CADRE D’UN ETAT DE DROIT DEMOCRATIQUE ET LAÏC ET D’UNE ECONOMIE LIBERALE.
Si le bien que les partis islamistes arabes pensent et disent de l’AKP est sincère, ils n’ont qu’à s’inspirer de son cheminement. S’ils arrivent à rééditer dans leurs pays ses exploits socioéconomiques et à faire montre d’autant de tolérance et de respect des autres, l’islamisme pourra prétendre au pouvoir dans n’importe quel pays du monde.
Dès lors que de telles évolutions auront été accomplies, nul ne trouvera à redire à ses victoires électorales puisqu’il sera devenu un mouvement politique soluble dans la démocratie.
IL EST ABUSIF NEANMOINS DE COMPARER LES PARTIS ISLAMISTES AVEC LES PARTIS DEMOCRATES-CHRETIENS OCCIDENTAUX CAR ON N’A JAMAIS VU UN DE LEURS LEADERS PROMETTRE L’APPLICATION LITTERALE DES PRESCRIPTIONS DE L’ANCIEN OU DU NOUVEAU TESTAMENT S’IL ARRIVAIT AU POUVOIR, NI LA REUNIFICATION DE L’EGLISE ET DE L’ETAT. ILS SONT INTEGRALEMENT DEMOCRATES ET N’ONT DE CHRETIEN QU’UNE VAGUE INSPIRATION MORALE.
LES AMERICAINS, POUR LEUR PART, SONT REPUTES POUR LA PLACE QU’ILS ACCORDENT A LA RELIGION DANS LEUR VIE, MAIS LEURS LOIS SONT FAITES PAR LE CONGRES ET NON DICTEES PAR LES PASTEURS ET LES PRETRES, UNE BIBLE A LA MAIN.
LA PHASE POSTREVOLUTIONNAIRE NE S’ARRETERA PAS AVEC L’INVESTITURE DES PARTIS QUI ONT GAGNE LES PREMIERES ELECTIONS. ON N’EST QU’AU DEBUT D’UNE NOUVELLE ERE QUI VERRA S’INSTALLER UNE VERITABLE VIE POLITIQUE QUI CLARIFIERA AU FUR ET A MESURE LES IDEES ET LES CHOSES.
AU FIL DU TEMPS, DES EXPERIENCES ET DES LEÇONS TIREES, DE NOUVEAUX PARTIS VONT SE FORMER, DES ALLIANCES SE NOUER, UNE SOCIETE CIVILE APPARAITRE, LE CORPS ELECTORAL S’INSTRUIRE DES CONSEQUENCES DE SON VOTE ET LES ESPRITS CREDULES SE DESENSORCELER.
Le courage qui a soulevé des centaines de milliers de personnes et la liberté de pensée et d’expression arrachée dans la foulée ne disparaîtront pas parce que des courants politiques religieux ont été portés au pouvoir. Ceux qui se sont soulevés contre la dictature et fait face à des moyens de répression impressionnants le referont le cas échéant.
Ils étaient des milliers à échanger sur la Toile, ils deviendront des dizaines et des centaines de milliers. «Un clic est plus fort qu’un flic» disaient les Tunisiens pendant leur révolution. Les médias nouvellement libérés ne se laisseront pas inféoder, la jeunesse « branchée » n’acceptera pas d’être brimée, les femmes ne se résigneront pas à un statut minoré. Avant c’était possible, plus maintenant.
LES PEUPLES QUI, COMME LES TUNISIENS ONT CONNU LE « PRINTEMPS ARABE » ET QUI ONT CONSENTI DES SACRIFIES POUR RECOUVRER LEUR LIBERTE DOIVENT SAVOIR POURQUOI ILS L’ONT FAIT ET CE QU’ILS DOIVENT EN FAIRE. ILS DOIVENT CHOISIR DANS QUEL MONDE ILS VEULENT VIVRE : CELUI DU DESPOTISME DES PERSONNES, HOMMES PROVIDENTIELS OU HOMMES DE RELIGION, OU CELUI QUI RESULTE DU BON FONCTIONNEMENT D’INSTITUTIONS DEMOCRATIQUES SOLIDES ET TRANSPARENTES, DE LA CONTRIBUTION DE CHACUN AU BIEN DE TOUS ET DU COMPTER SUR SOI PLUTOT QUE SUR L’ASSISTANAT TERRESTRE OU CELESTE.
Veulent-ils rester à l’état de masses, de bergerie soumise à la guidance hasardeuse de quelque bon ou mauvais berger, ou devenir les actionnaires de leur destin ?
Ils vont devoir aussi, dans le cas de certains, régler la lancinante question de leur coexistence avec leurs compatriotes appartenant à d’autres confessions ou obédiences comme les chrétiens et les chiites. Sauf à préférer la guerre civile et le démantèlement du pays comme a fait l’islamisme au Soudan, ou risque de le faire la secte Boko Haram au Nigeria.
CEUX QUI ONT TROUVE LE COURAGE DE S’INSURGER CONTRE LE DESPOTISME SECULIER TROUVERONT CELUI DE SE SOULEVER CONTRE LE DESPOTISME RELIGIEUX OU L’ETAT TOTALITAIRE. ILS N’ACCEPTERONT PAS QUE LE PERE QU’ILS ONT TUE SOIT REMPLACE PAR UN BEAU-PERE AUTOPROCLAME.
Les médias, jaloux de leur nouvelle liberté, défendront la liberté éditoriale et le pluralisme télévisuel. Les syndicats de magistrats qui se sont investis dans la révolution exigeront et obtiendront l’indépendance de la justice.
Dans l’opposition, les partis démocrates se feront connaître en harcelant le gouvernement, en mettant en avant ses contre-performances, en ne lui concédant rien qui puisse remettre en cause les acquis de la démocratie, en élaborant des propositions de lois et en démontrant à l’opinion publique qu’ils sont une alternative crédible et compétente. Petit à petit, ils trouveront le répondant nécessaire auprès de leurs concitoyens, toucheront en eux des fibres nouvelles, et finiront par en attirer un certain nombre dans leurs rangs.
Dans cette nouvelle vie politique libérée de la peur et de la censure, les masses s’intéresseront au débat politique, croiront en ce qu’elles verront, formeront leur jugement et SE LIBERERONT PROGRESSIVEMENT DE LA CULTURE THEOCRATIQUE.
Les intellectuels, les journalistes, les artistes et les cinéastes mettront en branle leurs capacités et leur génie pour contribuer à cette prise de conscience et à l’œuvre de rationalisation des masses.
IL EN SORTIRA QUE LA RELIGION EST UNE FOI ET LA POLITIQUE UN ART DE GERER, QUE DIEU N’EST POUR RIEN DANS LES ACTES DES HOMMES POLITIQUES, QU’IL N’EN A MISSIONNE AUCUN ET QU’ILS N’ENGAGENT QU’EUX-MEMES.
Telle est la dynamique intellectuelle et politique dans laquelle vont rentrer les peuples arabes, même ceux non touchés par la révolution. Ces derniers seront très attentifs à cette nouvelle expérience qui les concerne et les engage au même titre.
C’est ainsi que, progressivement, les citoyens arabes deviendront comme ceux des autres pays. Libre à eux de croire, de faire la prière et le jeûne ou de voiler leurs femmes, pourvu qu’ils respectent les règles du jeu démocratique, l’espace public, la liberté des autres, les minorités ethniques et/ou confessionnelles, les étrangers et les conventions internationales.
LA REPUBLIQUE EST UNE ASSOCIATION, UN CONTRAT SOCIAL, UNE INTERACTIVITE ENTRE LES DROITS ET LES DEVOIRS. C’EST UN CADRE DE VIE FLEXIBLE, ADAPTABLE, CONÇU POUR ABSORBER LES CHANGEMENTS, LES EVOLUTIONS, LE PROGRES ET MEME LES CATASTROPHES DE LA NATURE OU DE L’HISTOIRE. LA, LES SOLUTIONS NE VIENNENT PAS DE LA PROVIDENCE, MAIS DU TRAVAIL ET DE LA CONTRIBUTION QUOTIDIENNE DE CHACUN A L’ŒUVRE COMMUNE.
LES REVOLUTIONS EN COURS ONT SIGNE LE REVEIL DE LA CONSCIENCE ARABO-MUSULMANE DANS LES PROPORTIONS REVELEES PAR LES ELECTIONS. LES PEUPLES QUI LES ONT FAITES NE SONT PAS ENTRES EN DEMOCRATIE, MAIS DANS UN NOUVEL AGE QUI PEUT LES MENER A LA DEMOCRATIE.
Ce nouvel âge commencera avec la confrontation entre les tenants de la culture théocratique et les tenants de l’Etat démocratique, et se confirmera avec la définition d’une vie institutionnelle qui prenne en compte les valeurs musulmanes mais aussi la diversité des croyances, des opinions politiques et des ethnies.
LE NOUVEL ÂGE C’EST UNE ERE, UNE ETENDUE DE TEMPS DURANT LAQUELLE IL FAUDRA REUNIR L’UNE APRES L’AUTRE LES CONDITIONS NECESSAIRES A L’ETABLISSEMENT D’UNE VIE NATIONALE PACIFIEE ET CIVILISEE.
CHAQUE EXPERIENCE EN COURS DANS LE MONDE ARABO-MUSULMAN SERA UNE SOURCE D’INSPIRATION, CHAQUE EXPERIENCE ABOUTIE DEVIENDRA UN PRECEDENT, CHAQUE PRECEDENT TENDRA A DEVENIR UNE NORME, ET LE TOUT DONNERA AUX MUSULMANS UNE NOUVELLE CONCEPTION DU MONDE.
Cette évolution mènera à la pratique d’un islam éclairé, tolérant, comme celui qu’ont connu leurs ancêtres. L’important est que le chemin soit pris, que l’on se mette dans l’axe, qu’on regarde loin devant soi, par-dessus l’épaule des despotes et des ulémas obscurantistes car il y en a eu d’éclairés comme les cheikhs Ben Badis ou El-Ibrahimi en Algérie.
CE SERA, A LONG TERME, L’ACQUIS LE PLUS EXTRAORDINAIRE DE CES REVOLUTIONS, QUAND ELLES AURONT RECONCILIE L’HOMME ARABE AVEC LA MODERNITE, LA CITOYENNETE ET LE RESTE DE L’UNIVERS. LA PROMESSE DE CET ACQUIS EST INFINIMENT PLUS IMPORTANTE QUE LE RENVERSEMENT DES REGIMES DICTATORIAUX. C’EST CE QU’IL FAUT DEJA COMPTABILISER COMME GAIN HISTORIQUE.
LE NOUVEL ÂGE S’IMPOSERA, LE COURS DE L’HISTOIRE LE DICTE ET L’EXEMPLE DE PAYS MUSULMANS NON ARABES COMME LA TURQUIE, LA MALAISIE ET L’INDONESIE QUI ONT BEAUCOUP AVANCE SUR LA VOIE DE LA MODERNITE ET DE LA DEMOCRATIE LE MONTRE.
IL RESULTERA DE LA CONVERGENCE DE TROIS EVOLUTIONS : CELLE DU COURANT MODERNISTE, CELLE DU COURANT ISLAMISTE ET CELLE DE LA CONSCIENCE POPULAIRE. ELLES ONT COMMENCE IL Y A UN SIECLE, SURTOUT DANS LES REPUBLIQUES, MAIS ELLES ONT ETE RETARDEES ET CONTRARIEES PAR LE DESPOTISME INTERESSE PAR L’IMMOBILISME CHEZ LES UNS ET LES AUTRES.
Le courant moderniste apparu à la fin du XIXe siècle a enfourché des idéologies qui l’ont finalement éloigné de la majorité du peuple, de ses intérêts et de ses valeurs : marxisme, laïcisme (Iran des Pahlévis et Turquie de Mustapha Kemal), baathisme, libéralisme…
Ces idéologies ayant servi la cause de la libération et de la lutte contre le colonialisme ont été par la suite converties en partis uniques et en partis-alibis servant de devanture au despotisme. La république et le multipartisme n’étaient que des trompe-l’œil, ils cachaient des régimes autoritaires et prédateurs qui, allant au bout de leur logique, voulurent devenir carrément des dynasties.
L’ISLAMISME RADICAL, AVATAR VIOLENT DE LA CULTURE THEOCRATIQUE, A CAPITALISE AU FIL DU TEMPS LES DECEPTIONS ET LES FRUSTRATIONS DES PEUPLES, ET FINI PAR SE PRESENTER EN ALTERNATIVE A L’ECHEC DES ELITES MODERNISTES CIVILES ET MILITAIRES.
Aussi, lorsque les révolutions arabes ont renversé les rapports de force au profit des peuples, ceux-ci s’empressèrent d’en remettre les bénéfices au courant islamiste, jugeant qu’il n’a pas été partie prenante à un siècle de direction moderniste aux résultats peu probants. Avec sa vision différente de la politique et des affaires internationales, son discours nouveau et ses nouveaux visages, il leur paraissait incarner idéalement le changement.
Aujourd’hui qu’ils ont été confrontés aux réalités internes et externes, les partis islamiques sont obligés d’adopter le profil de partis de gouvernement ou disparaitre comme acteurs politiques. Les peuples, ayant recouvré leur dignité et leur liberté, reprendront confiance en eux-mêmes et s’impliqueront dans la vie politique, développant ainsi leur sens critique et leur sens des réalités.
La «majorité silencieuse», celle qui ne vote pas et qui se plaint par la suite du choix des autres, comprendra l’importance de l’urne sur sa propre vie et aura à cœur de s’investir dans la sélection des partis et des hommes qui dirigeront le pays.
Chaque partie ayant accompli ces efforts, ayant réalisé ces évolutions, les forces qui animent la société finiront par converger vers des compromis et s’accepter mutuellement dans le jeu de l’alternance.
Un autre danger, plus imminent que celui de retourner au Moyen-âge, plane sur les peuples arabes qui viennent de se libérer, celui de l’anarchie. Si l’instabilité persiste au-delà du supportable et que les gouvernements se succèdent comme dans un rodéo où les cavaliers se relaient sur le dos d’un cheval fougueux pour être aussitôt jetés à terre, il y aura péril sur la révolution.
L’ancienne dynamique économique en Tunisie et en Égypte a été cassée et ne sera pas de sitôt remplacée par une nouvelle. Il faudra pour cela beaucoup de temps. Mais si le comportement social et les mœurs subissent de brutaux changements, l’investissement local et étranger s’en ressentira, ce qui compromettra la reprise dans des secteurs comme le tourisme et aggravera la situation. Or tout ce qui est retenu de l’islamisme, c’est qu’il piaffe d’impatience de changer les mœurs.
LES PEUPLES SERONT PLUS EXIGEANTS AVEC LES NOUVEAUX POUVOIRS QU’ILS NE L’ETAIENT AVEC LES ANCIENS. CES DERNIERS NE LEUR DEVAIENT RIEN TANDIS QUE LES NOUVEAUX LEUR DOIVENT TOUT. LA LIBERTE DE MANIFESTER OU DE SE METTRE EN GREVE S’ETANT IMPOSEE D’ELLE- MEME, LES MEDIAS S’ETANT OUVERT A TOUT LE MONDE, UNE MASSE COLOSSALE DE DOLEANCES A SURGI, IMPATIENTE ET MENAÇANTE.
Il y a une quinzaine de jours, Moncef Marzouki et le nouveau Premier ministre étaient accueillis à Kassreïne aux cris de «Dégage !». Ils avaient appelé quelque temps auparavant grévistes et protestataires à une «trêve de six mois» pour donner sa chance au nouveau gouvernement. Marzouki avait même agité le spectre du «suicide collectif» si l’économie ne reprenait pas rapidement et que les gens ne retournaient pas à leurs activités. En Tunisie, on en est au troisième ou quatrième gouvernement depuis le départ de Ben Ali, alors qu’en Égypte on ne les compte plus depuis la chute de Moubarak.
En Libye, des unités de combattants ne reconnaissent pas les décisions du CNT et refusent d’exécuter ses injonctions. Elles ne veulent pas désarmer et revendiquent une participation dans les instances dirigeantes. Des affrontements ont déjà eu lieu ici et là qui ne présagent de rien de bon. DANS CE PAYS OU IL N’Y AVAIT RIEN D’AUTRE QUE LA PERSONNE DE KADHAFI ET SON ABSURDE LIVRE VERT, TOUT DOIT ETRE CONSTRUIT EX NIHILO.
LES MUSULMANS SONT EN 1432 QUAND LE CALENDRIER UNIVERSEL AFFICHE 2012.
POUR COMPRENDRE LEURS DIFFICULTES A S’ADAPTER A LA DEMOCRATIE, IL FAUT LES RAMENER A L’EPOQUE OU LES PAYS D’EUROPE SORTAIENT DE LA CHRETIENTE POUR RENTRER DANS LES TEMPS MODERNES SOUS FORME D’ETATS NATIONAUX, QUELQUE PART A L’EPOQUE DE SAVONAROLE (1452-1498) QUI AVAIT CREE A FLORENCE UN ETAT THEOCRATIQUE AVANT DE FINIR PENDU PUIS BRULE POUR SON FANATISME.
IL NE FAUT PAS JUGER LES PEUPLES ARABES QUI VIENNENT DE SE LIBERER PAR COMPARAISON AVEC LES PAYS EUROPEENS, MAIS PAR COMPARAISON AVEC LES PEUPLES ARABES, OU AUTRES, QUI NE SONT PAS SOULEVES CONTRE LE DESPOTISME.
AU REGARD DE CES DERNIERS, ILS ONT FAIT UN PAS DE GEANT POUR REJOINDRE LE TROISIEME MILLENAIRE.
« Le Soir d’Algérie » du 26 janvier 2012