Home ARTICLESLa problématique algérienne2011-2016 FRANCOIS HOLLANDE, ENTRE CELERITE ET ALACRITE

FRANCOIS HOLLANDE, ENTRE CELERITE ET ALACRITE

by admin

Il est venu, il a vu et il est reparti en nous laissant en proie à des interrogations : pourquoi ‎est-il venu, qu’a-t-il vu et qu’a-t-il emporté en dehors de l’accord sur le gaz de schiste ?

Comme si ces mystères ne suffisaient pas, François Hollande a ajouté à notre ‎incompréhension un problème lexical avec cette histoire d’ « alacrité » dont nous n’étions ‎pas très nombreux ici et en France, hors les gens de l’Académie française, à connaître la ‎signification.

Célérité oui, plus ou moins, mais alacrité c’est carrément du latin pour le commun des deux ‎peuples. ‎

Le mot est venu dans la déclaration faite par le président français après son entrevue avec ‎son homologue algérien : « Le président Bouteflika m’a donné une impression de grande ‎maîtrise intellectuelle, et même c’est rare de rencontrer un chef d’Etat qui a cette alacrité, ‎cette capacité de jugement… »

Les mots célérité (de « celeritas ») et alacrité (de « alacritas ») partagent la même origine, ‎le latin effectivement, riment et comportent tous deux l’idée de vitesse, de mouvement. ‎Célérité veut dire rapidité, promptitude, et alacrité « gaieté entraînante ».

Personnellement, j’ai pris la seconde pour la première jusqu’à ce qu’il me soit venu la ‎curiosité d’aller vérifier dans le dictionnaire et, là, je me suis demandé s’il n’est pas arrivé à ‎Hollande ce qui m’est arrivé car en remplaçant « alacrité » par « gaieté entraînante » la ‎phrase devient boiteuse : « Un chef d’Etat qui a cette gaieté entraînante, cette capacité de ‎jugement… » non, ça ne tient pas la route.

Sauf s’il y a eu durant l’entretien un moment d’hilarité à l’initiative de notre président qui ‎n’ignore pas le penchant facétieux du chef d’État français. Mais si tel avait été le cas, ‎Hollande aurait mis une conjonction de coordination, une liaison entre les mots alacrité et ‎capacité. Or il ne l’a pas fait d’après ce qu’en a rapporté la presse.‎

Il se serait aussi gardé de commettre un impair sachant que s’il est malséant de parler de ‎corde dans la maison d’un pendu, il est tout aussi malséant de parler d’ « entrainement » à ‎propos d’un homme qui n’est plus capable de mouvement. ‎
Laissons là les aspects de forme pour nous occuper maintenant du fond.

A quels chefs d’État n’ayant pas la « capacité de jugement » de notre président aurait pu ‎penser Hollande si on lui avait posé la question à brûle-pourpoint ?

A l’un d’entre ceux en fonction en Europe, en Amérique, en Asie, en Australie ou en Afrique ‎noire ? Il n’y en a aucun qui soit dans son état.

On peut songer à Castro que le président français a visité à la Havane il y a quelques ‎semaines, mais il a renoncé à toute fonction officielle depuis plusieurs années. ‎
Je ne vois qu’un cas où Hollande aurait parlé juste en tenant les propos qu’il a tenus lors de ‎sa conférence de presse à Alger : à la sortie d’une rencontre avec Stephen Hawking, ‎l’astrophysicien britannique qui a prouvé l’existence des « trous noirs » et qui a été atteint ‎d’une maladie rare dans sa jeunesse qui lui a fait perdre toutes ses fonctions physiologiques. ‎Depuis, il vit sur un fauteuil roulant aménagé et branché à un ordinateur conçu pour lui.

Stephen Hawking est un génie encore actif dans la communauté scientifique, et peu d’êtres ‎humains sur la planète peuvent rivaliser avec son intelligence, sa « maîtrise intellectuelle » ‎et sa « capacité de jugement ».‎

Pourquoi n’a-t-on des nouvelles de Bouteflika que par ouïe dire, par messagers interposés, ‎intéressés ou en service commandé ? ‎

Pourquoi trouve-t-il convenable de se montrer dans son état aux étrangers, et honteux de se ‎montrer aux siens autrement que de loin ou au moyen d’images traficotées ? ‎
Pourquoi ne nous parle-t-il pas à la télévision pour que nous nous soyons aussi rassurés que ‎François Hollande sur sa célérité d’esprit et son alacrité ? ‎

Nous n’avons pas plus de raisons de croire Hollande que nous n’avions de croire Ouyahia ‎quand il nous apprenait la semaine dernière que le président avait récupéré « 150% de ses ‎capacités ».

Le premier l’a fait pour les intérêts de son pays qui ne peuvent pas être mieux servis que par ‎un président diminué au possible et tenant à pareil témoignage flatteur, et le second par ‎simple intérêt personnel.‎

Ça me rappelle des scènes de la vie coloniale que je préfère ne pas vous rappeler pour ne ‎pas vous pousser au suicide.‎

‎(« Le soir d’Algérie » du 18 juin 2015)‎

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