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L’ALGERIE EN PERDITION

by admin

L’historien grec Hérodote disait de l’Egypte qu’elle était un don du Nil. Le paraphrasant, j’ai écrit il y ‎a des décennies de cela que l’Algérie était un don du pétrole. Le Nil coule depuis des millions ‎d’années alors que le pétrole, découvert il y a moins d’un siècle, va disparaître sous peu à l’échelle ‎de Kronos.‎

Le Nil, source de 90% de son système hydrique, a permis à l’Egypte de donner au monde l’une de ‎ses plus grandes civilisations dont attestent les Pyramides qui ont fait son prestige mondial et lui ‎rapportent de précieuses devises de nos jours.

Or, pour la première fois depuis cinq mille ans, une ‎menace apparaît qui risque de couper le cordon ombilical qui la relie à la vie.‎ Par la faute de l’Ethiopie, pensent Égyptiens et Soudanais, qui a construit en amont du fleuve un ‎système de rétention baptisé « Barrage de la renaissance ».

Une renaissance de l’Ethiopie peut-‎être, mais un déclin certain pour l’Egypte et le Soudan. Sans le Nil les deux pays n’auront pas assez ‎d’agriculture pour manger ni assez d’eau potable pour boire, ce qui donnera probablement lieu à la ‎première guerre de l’eau du XXIe siècle. ‎

Le pétrole a été découvert en Algérie à la fin des années 1940 et son exploitation a commencé en ‎‎1956, en pleine guerre d’Algérie, comme si la Providence voulait nous donner les moyens de notre ‎indépendance, une sorte de viatique en attendant que nous soyons capables de créer nos propres ‎moyens d’existence. Ce que nous n’avons toujours pas fait après soixante ans.‎

Héritant d’un pays construit, d’une administration fonctionnelle, d’une agriculture exportatrice et ‎d’une source d’énergie promise à des hausses de prix vertigineuses, les Algériens prirent ‎possession de leur beau et immense pays auquel ils allaient innocemment appliquer leur « fhama » ‎‎(vision du monde à l’envers) subventionnée par l’argent du pétrole gagné en dormant.

Ils pouvaient se permettre de perdre leur temps dans le nombrilisme et le khéchinisme car n’ayant ‎plus besoin de rouler leur couscous pour manger la même chose chaque jour, ni de faire suer leur ‎burnous pour joindre les deux bouts.‎

Cette « fhama » porta divers noms (indépendantisme révolutionnaire, socialisme autogestionnaire, ‎‎« réformes libérales », retour aux sources et islamisme, « novembariya »…) et les conduisit ‎successivement au parti unique, aux coups d’Etats, à la tragédie d’octobre 1988, au terrorisme des ‎années 1990, à vingt ans d’encanaillement dont le coût a dépassé les 1000 milliards de dollars et, ‎enfin, à l’Absurdistan nommé « nouvelle Algérie ».‎

Plus jamais le pays ne disposera de telles rentrées en devises car l’histoire du pétrole et du viatique ‎providentiel arrive à sa fin. Avec cet argent on pouvait faire de l’Algérie un don de l’Albien, du nom ‎de cette plus grande réserve d’eau douce au monde qui s’étend sur un million de km2 dont 70% ‎dans les profondeurs de notre Sahara, mais il était plus facile de dilapider la manne. ‎

Ayant été mal faite par le haut entre 1962 à 2019 en l’absence d’un peuple de citoyens, l’explosion ‎populaire du 22 février 2019 donna à croire que l’Algérie allait enfin être reconstruite par le bas, sur ‎la base de la restauration de la souveraineté populaire.

Malheureusement le compte n’y était pas. ‎C’était une illusion. ‎

Ni le pouvoir ne le voulait, ni le peuple ne le pouvait. Certes, elle a réalisé deux buts importants, ‎mettre fin au long règne des Bouteflika et unir le peuple dans son ensemble, mais elle n’a pas ‎réussi l’opération de métamorphose du « peuple » tout court en « peuple de citoyens », ni à ‎mettre fin au « système ». Conséquence, le pays est revenu à la case départ. ‎

J’ai accompagné le « Hirak » avec 25 articles publiés entre le 23 février 2019 et le 1er juillet 2019. Le ‎‎10 mars j’avais publié « L’INCROYABLE A ETE FAIT, RESTE LE CROYABLE » où je disais :

(Début de ‎citation) « Le peuple algérien flottait dans les airs avec le sentiment d’être adulé des cieux pour avoir ‎accompli l’incroyable. Il y a de quoi, en effet, et il le mérite amplement et de l’aveu du monde entier. ‎Ce qu’il a fait relève proprement de l’incroyable car inattendu et allant à contre-sens de ce qu’on ‎pensait de lui et de ce qu’il pensait de lui-même…

Cet « incroyable », c’est le nombre fabuleux de personnes qui sont sorties manifester, la ‎synchronicité de leurs mouvements, l’unicité des mots d’ordre d’un point à l’autre du territoire ‎national, l’adhésion générale aux idéaux démocratiques…

La force, la pérennité et la sécurité de ‎cette révolution citoyenne résident dans sa capacité à mobiliser le peuple chaque fois que ‎nécessaire, jusqu’à la réalisation de ses objectifs : fin de l’ère Bouteflika et du « système » tapi dans ‎les institutions, principalement.

Mais il faut se préparer à descendre du ciel, à mettre pied sur terre pour faire face à l’ordinaire, au ‎plus urgent, pour construire de ses mains et avec ses propres idées le « croyable ».

Le « croyable », ‎ce sont l’avenir, l’unité nationale, le socle idéologique consensuel, les institutions démocratiques, ‎une économie indépendante des hydrocarbures…Il y a tellement de choses à faire qu’on en a le ‎vertige, mais on est obligés de les faire car le temps presse…‎

Il faut se préparer à quitter l’ambiance de fête pour s’engager dans une période de turbulences au ‎bout de laquelle le pays entrera dans une nouvelle ère : celle de la NOUVELLE ALGERIE, rajeunie et ‎plurielle, libre et fraternelle, démocratique et sociale, comme la voulaient la Proclamation du 1er ‎Novembre 1954 et la Plateforme de la Soummam. Sans « açabiyate », sans exploitation par les uns ‎ou les autres de l’islam, des valeurs de novembre ou de l’amazighité… ‎

Le « système » disparaîtra au fur et à mesure que le peuple qui a initié la Révolution citoyenne ‎dégagera ses représentants (sorte de « Coordination nationale de la révolution citoyenne ») et que ‎ceux-là s’organisent en force politique pour veiller au succès du processus de démocratisation du ‎début à la fin…

S’il y a ce que peut faire le pouvoir, il y a aussi ce que peut faire le peuple. Pour ma ‎part, je continuerai à proposer des idées comme je le fais depuis un demi-siècle. J’oserai même dire ‎les mêmes idées » (Fin de citation).‎

Personnellement j’attendais une « révolution citoyenne », mais c’est un « Hirak » – mot arabe ‎désignant un mouvement de foule sans contenu idéel, sans orientation sémantique, sans ‎programme et sans direction – qui s’imposa à la place, facilitant sa dispersion par la combinaison de ‎la répression et de l’antagonisme entre séparatistes kabyles et anti-Kabyles primaires, tous les ‎deux extrémistes et minoritaires dans le pays.

Aujourd’hui l’Algérie est semblable à un bateau sans gouvernail, sans équipage, sans cap et bientôt ‎sans vivres… Un bateau en perdition. La minorité a pris le commandement de la majorité et trouve ‎plus facile de jeter en prison quiconque s’insurge contre ses dérives ou lui rappelle des vérités ‎élémentaires. ‎

J’ai utilisé pour la première fois l’expression de « Nouvelle Algérie » dans mon discours devant le ‎Congrès constitutif du PRA le 3 mai 1990 à la coupole du stade du 5 juillet. Puis j’en ai fait le titre de ‎mon programme à l’élection présidentielle de 1995. Maintenant elle me fait horreur.‎

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