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LA VIE DE MALEK BENNABI (7)‎

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Depuis qu’il est en France, mais surtout depuis qu’il fréquente l’Union Chrétienne des Jeunes ‎Gens (UCJG) de la rue Trévise, Bennabi a relevé le fort décalage entre « l’authenticité » des ‎valeurs et « l’efficacité » des actes qui caractérise le milieu musulman. Il repère par contre ‎la profonde cohérence dans le comportement juif quand il se lie à un condisciple israélite ‎d’origine roumaine, Karlik, qui l’invite souvent chez lui où il est fort bien reçu. Il observe et ‎réfléchit, compare et juge. ‎

A l’inverse des nombreux jeunes musulmans qui, au contact de la civilisation occidentale, ‎aperçoivent les mêmes phénomènes sans en tirer des conclusions, lui fait mentalement des ‎retours sur lui-même et s’interroge sur la signification réelle de l’« Islahisme » (mouvement ‎réformiste algérien impulsé par l’ Association des Oulamas Algériens sous la conduite de ‎Ben Badis puis, après sa mort, de Bachir al-Ibrahimi) qui occupait jusque-là son esprit. Il ‎culpabilise : « Je voulais dilater mon temps et mon cerveau pour absorber toute la science ‎de l’Occident et dilater mon âme pour absorber, saisir et communiquer à mes ‎coreligionnaires toute la spiritualité chrétienne ». ‎

Il est venu à Paris quelque peu panislamiste, c’est-à-dire sensible à tout frémissement de la ‎pensée ou de l’action islamique où qu’il se manifeste. Aussi suit-il à travers la presse ‎française l’épopée de Abdelaziz Ibn Séoud (1880-1953). Le wahhabisme (doctrine rigoriste ‎de l’islam en vigueur en Arabie saoudite) est devenu depuis 1912 une idéologie d’Etat. ‎Bennabi le regarde comme une promesse de renaissance musulmane.‎

L’arrivée à Paris de Abdelmadjid Khaldi, une connaissance de Tébessa, lui ouvre la voie du ‎milieu estudiantin maghrébin où il se lie à quelques figures qui deviendront célèbres : Habib ‎Thameur, Salah Benyoucef et Hédi Nouira, les Tunisiens ; Ahmed Belafredj et Mohamed Al-‎Fassi, les Marocains… ‎

L’administration française qui est attentive à l’activisme des Maghrébins sur son sol ne ‎saurait être indifférente à ces premières formes d’organisation de l’élite nord-africaine, et ‎encourage les zizanies entre la ligne « Unioniste » défendue par les Tunisiens et les ‎Marocains, et la ligne « Séparatiste » soutenue par les Algériens. Bennabi s’affiche contre ‎ces derniers avec son ami Benabdallah, étudiant en droit. ‎

Le maire de Paris, M. Collin (1) suit de près le mouvement d’opinion qui agite ce milieu, ‎mais plus encore Louis Massignon, orientaliste, arabisant, professeur au Collège de France ‎et « Conseiller du Gouvernement pour les affaires nord-africaines ». Entre les « Idéalistes », ‎partisans de l’unité maghrébine, parmi lesquels Bennabi, et les « Réalistes », menés par ‎Amar Naroun (1906-1988) (2), c’est ce dernier courant qui a les faveurs de Massignon et du ‎maire de Paris. Les joutes sont chaudes et les empoignades fréquentes entre les deux ‎tendances. ‎

Ce qu’il observe chez les jeunes gens chrétiens de l’Union, Bennabi ne le retrouve pas chez ‎ses compatriotes et cela le désole au plus haut point : « Depuis mon séjour à Paris je me ‎sentais très différent de mes coreligionnaires, même dans le domaine religieux où ma foi ‎n’était pas contemplative mais agissante. J’étais devenu l’esprit pragmatique et ‎passablement scientifique dont le réalisme et la précision ne pouvaient que surprendre des ‎esprits habitués à l’imprécision et au surréalisme ». ‎

Même à niveau égal les étudiants qu’il rencontre à l’UCJG et ceux qu’il fréquente à ‎l’« Association des étudiants musulmans nord-africain» (AEMNA)(3) n’ont pas les mêmes ‎modes de fonctionnement psychologique, ni les mêmes performances dans l’action : « Les ‎premiers sont le produit d’une civilisation et d’un savoir, alors que les seconds ont le même ‎savoir mais sont le produit d’une décadence. Le savoir est une somme de connaissances ‎transmissibles à n’importe qui alors que le comportement civilisationnel n’est pas ‎transmissible par mimétisme, il est imprimé dans le psychisme. L’instruction donnée dans ‎les écoles et les établissements supérieurs a été précédée d’une éducation donnée par le ‎milieu familial et consolidée par le milieu social. Or, quand on évolue dans une société pré-‎civilisée ou post-civilisée (décadente), on ne peut compter que sur le seul savoir qui n’est ni ‎confirmé, ni prolongé dans la société où l’ignorance ambiante et les idées mortes véhiculées ‎par les traditions finissent par neutraliser ses effets et le stériliser » (« MTS » II). ‎

Sur le conseil d’un de ses professeurs, il s’inscrit à l’Ecole spéciale de mécanique et ‎d’électricité (ESME) que dirige un savant, M. Sudria. C’est à cette époque que Hamouda Ben ‎Saï arrive à Paris pour étudier la philosophie à la Sorbonne. Les deux amis confrontent vite ‎leurs points de vue sur l’évolution des idées dans le monde musulman. Ils sont d’accord sur ‎le fond, la renaissance de l’islam et la nécessité d’un réveil du monde musulman, mais n’ont ‎pas les mêmes avis sur les courants politiques qui traversent l’Afrique du Nord et l’Algérie en ‎particulier. ‎

Bennabi soutient l’ « Islahisme » dans lequel il voit la possibilité d’une réforme ‎psychologique et sociale capable de provoquer une véritable renaissance, et devient ‎wahhabite en suivant à distance l’œuvre d’Ibn Séoud, alors que Hamouda Ben Saï est assez ‎réservé sur cette doctrine. ‎

Mais, de l’aveu même de Bennabi, son ami connaît mieux que lui l’histoire et la culture ‎musulmanes. C’est lui qui, par ses analyses, ses explications et son approche novatrice attire ‎son attention sur certains aspects dont il fera plus tard des thèmes dans ses ouvrages. ‎

Il écrit, modeste et reconnaissant : « L’esprit wahhabite, dans ces années qui suivaient sa ‎fraîche installation à la Mecque et à Médine, me paraissait la bouée de sauvetage du monde ‎musulman. Mon ami ne voulait pas partager mon engouement… Un avenir assez proche ‎montrera, quand la bouée de sauvetage sombrera dans le pétrole, qu’il avait raison. Je dois ‎avouer après trente ans, que ce rêveur fut plus perspicace que moi. (4) » ‎

Une Exposition coloniale se tient en 1931 à Vincennes à l’initiative du maréchal Lyautey. Le ‎public vient y admirer les diverses cultures sur lesquelles rayonne la « mission civilisatrice ‎de la colonisation ». Bennabi la visite un jour et, parcourant ses travées, tombe sur un stand ‎tenu par les Pères blancs où un livre intitulé « Lettres algériennes » est distribué ‎gratuitement. Il est d’un avocat algérien, Hocine Lahmak, et consiste, selon le jugement de ‎Bennabi, en un « plaidoyer contre l’islam ». Outré, il mène contre ce livre une véritable ‎campagne au Quartier latin. ‎

Le vendredi 5 décembre de la même année, il se marie avec une française convertie à ‎l’islam qui a adopté le nom de la première épouse du Prophète, Khadija. Il l’a connue à la ‎bibliothèque Sainte-Geneviève, non loin de l’hôtel où il loge : « Elle allait devenir mon ‎épouse, ma compagne et un peu la remplaçante de ma mère quand celle-ci mourra. » Le ‎mariage est célébré religieusement en présence de Mohamed al-Fassi et de Habib Thameur. ‎Bennabi leur déclare le plus sérieusement du monde qu’il a offert à sa femme un « sadaq » ‎‎(dot) d’un quart de dinar soit, à l’évaluation de 1931, quatre francs : « J’avais en effet versé ‎cette somme à ma femme qui garda les quatre pièces que je lui ai données et les garde ‎d’ailleurs jusqu’à ce jour » (1951).‎

Au siège de l’AEMNA, de nouvelles figures arrivent parmi lesquelles les Algériens Sahli ‎‎(1906-1989), Boumendjel (1906-1984) et Kessous (1903-1965). Ce dernier donne un jour une ‎conférence dans laquelle il défend les thèses des « réalistes ». Bennabi se propose pour la ‎prochaine, le 20 décembre 1931. La conférence est intitulée « Pourquoi nous sommes ‎musulmans ». ‎

Au cours du débat qui suit l’exposé, Amar Naroun, Ahmed Kessous et Ahmed Boumendjel lui ‎reprochent de « se tourner vers le passé »(5). Par contre, Salah Benyoucef, le futur homme ‎d’Etat tunisien, se lève et l’embrasse fougueusement. Mohamed al-Fassi, le futur ministre ‎marocain, n’est pas en reste : surexcité, il proclame Bennabi « doctrinaire de l’Unité nord-‎africaine ». ‎

Alors qu’il prend son repas à la cantine de l’UCJG, un inspecteur de police de la brigade ‎spéciale de la rue Lecomte en charge des « problèmes maghrébins » se dresse un matin ‎devant sa table, lui montre ses papiers et lui pose des questions dont celle-ci : « Qui pourvoit ‎à tes besoins ? » – « Mon père », répond Bennabi. ‎

Quelques jours plus tard, Hamouda Ben Saï l’informe que, selon un message apporté par ‎Boumendjel, Massignon veut le voir. Bennabi n’apprécie pas qu’on l’invite de cette façon ‎qu’il juge cavalière et refuse de se rendre à l’invitation. Il est grisé par son succès de la ‎semaine dernière. On lui propose la vice-présidence de l’AEMNA, mais il décline l’offre au ‎profit de Ben Saï. ‎

Quelques semaines après, son père lui écrit de Tébessa pour lui demander d’intervenir ‎auprès d’une haute personnalité à Paris afin de lui éviter d’être muté sans raison dans une ‎commune mixte (6) des Aurès. Le nom de cette personnalité, selon ce que lui en avait dit ‎l’administrateur de Tébessa, Batistini (7) , était… Louis Massignon. Deux ou trois années plus ‎tôt, Batistini avait été un élève de ce dernier. C’est lui qui dit un jour à Larbi Tébessi : « Nous ‎voulons enterrer le Coran et vous, vous voulez le ressusciter ? ». ‎

Bennabi comprend le message et, pour éviter à son père de perdre le petit emploi de ‎‎« khodja » qu’il tient à Tébessa depuis une vingtaine d’années, téléphone pour prendre ‎rendez-vous chez « l’éminent spécialiste auprès du Gouvernement français des questions ‎islamiques ». Il est reçu à son domicile, rue Monsieur. A peine est-il assis que Massignon lui ‎demande s’il peut faire assister à la rencontre Hocine Lahmak. A l’évocation de ce nom, ‎Bennabi a une réaction de répulsion et dit son refus d’être en sa présence surtout qu’il n’y ‎voyait pas de raison. ‎

Il reconnaîtra plus tard cette « erreur politique » et ce manquement aux bonnes manières : ‎‎« J’étais un exemple complexe de sincère humilité et d’innocent orgueil ». Massignon était ‎resté impassible. Il l’avait écouté exposer le but de sa visite sans se prononcer puis l’avait ‎raccompagné (8). Le père de Bennabi ne trouvera plus de travail jusqu’à sa mort. Sur le ‎coup, notre héros est loin de se douter que toutes les portes allaient dorénavant se fermer ‎inexorablement devant lui tant en France qu’en Algérie. ‎

Les cogitations intérieures de Bennabi sont toujours dominées par le clivage moral, mental ‎et intellectuel qu’il constate entre les jeunes gens chrétiens de l’Union et les étudiants ‎musulmans. Au Quartier latin il découvre la science occidentale, et à l’UCJG l’âme ‎chrétienne : « Et sur un point comme sur l’autre, j’étais obligé, hélas, de reconnaître le ‎retard de la société musulmane ». ‎

Il crée avec un ami français une « Amicale franco-nord-africaine », dont il est le président, ‎dans le but de rapprocher les deux jeunesses et les deux cultures : « C’est dans ce rôle de ‎missionnaire entre deux races, deux mentalités, deux jeunesses différentes, que j’ai pris ‎conscience de toutes les tares du monde musulman post-almohadien» note-t-il dans ses ‎Mémoires inédits. L’amicale développe quelques activités à forte connotation ‎anticolonialiste puis tombe en désuétude. ‎

A l’Union, Bennabi est regardé comme un « missionnaire musulman », et au Quartier latin ‎comme un militant panislamiste. Mais voilà que se signale à son attention un étudiant en ‎doctorat syrien, parent d’un grand nom du panislamisme, Chékib Arslan (1869-1946). Il ‎s’appelle Farid Zin-Eddin et vient de fonder avec un Copte égyptien « l’Association de l’unité ‎arabe » (9). Bennabi y adhère. Elle devait péricliter après le départ de Zin-Eddin. Rien des ‎activités de Bennabi ne devait bien sûr échapper à la police de la rue Lecomte.‎

Les vacances venues, ils prennent sa femme et lui le bateau pour Alger qu’il voit pour la ‎seconde fois : « Je fus agréablement surpris en y arrivant cette fois avec ma femme. » Ses ‎parents ne savent pas encore qu’il est marié. Aussi demande-t-il à al-Okbi de lui trouver une ‎famille à Alger à qui il pourrait confier sa femme pendant que lui se rendrait à Tébessa. ‎

Ses parents ont déménagé, ils habitent maintenant 18, rue du Prophète dans un quartier de ‎la ville. Il retrouve le décor qu’il a laissé il y a deux ans, mais la ville lui semble plus vivante, ‎plus belle, plus animée. Elle a été gagnée à l’ islah. Il enregistre ce qui lui apparaît comme ‎des transformations sociales dues à la solidarité, au sens collectif, aux valeurs morales, ‎toutes choses qui évoquent à ses yeux la « civilisation ». Il est optimiste quoique inquiet pour ‎l’avenir de sa famille, son père étant au chômage. Il passe d’attendrissants moments auprès ‎de sa mère handicapée puis prennent ensemble des vacances thermales en Tunisie qui ‎s’étalent sur six semaines. Hamouda Ben Saï est pendant cette même période à Alger où il ‎donne au « Cercle du progrès » une conférence sur « La politique et le Coran » (10). ‎
‎ (A ‎SUIVRE) ‎

‎ NOTES :‎

‎ Il s’agit de Pierre Godin, président du Conseil de Paris qui n’était pas encore une mairie.‎
‎ ‎
‎2 Qui ne tardera pas à se convertir au christianisme (ce fait n’est pas rapporté par Bennabi).‎

‎3 Créée à Paris en 1927, elle était le prolongement de celle fondée à Alger en 1919 et que Ferhat Abbas (1899-‎‎1985) a présidée de 1927 à 1931. Selon C.R.Ageron, l’AEMNA a été créé à l’instigation de l’Etoile Nord-Africaine ‎par le « communiste tunisien Ben Milad en 1927 » (cf. « Actes du Colloque », op. cité). Guy Pervillé, de son côté, ‎rapporte qu’il y avait vers 1930 une centaine d’étudiants musulmans à Alger et une trentaine à Paris : « Suivant ‎l’exemple de leurs camarades français, ils commençaient à se regrouper en associations d’étudiants musulmans ‎nord-africains d’abord à Alger en 1919, puis à Paris en 1927… Elles tendirent progressivement à élargir leur ‎champ d’action vers le domaine politique… Les autorités françaises soupçonnent l’AEMNA d’être une filiale de ‎l’Etoile et du parti communiste (auquel auraient appartenu ses deux secrétaires généraux, le tunisien Ahmed Ben ‎Milad et l’Algérien Ahmed Kessous). En février 1930, l’assemblée générale présidée par le Marocain Ahmed ‎Belafredj vota l’exclusion des étudiants naturalisés français, au nom des principes de l’islam. Peu après, en mai ‎‎1930, l’AEMNA s’associa aux protestations contre le « Congrès eucharistique de Carthage », puis contre le Dahir ‎berbère, manifestant clairement son engagement national autant que religieux. » (Cf. « Le mouvement étudiant ‎algérien à Alger et à Paris de 1919 à 1939 » in « Actes du colloque. »). ‎
‎ ‎
‎4 Dans ses Mémoires inédits Bennabi ajoute à son sujet : « Il était par ailleurs la droiture même, le scrupule ‎personnifié et surtout mon maître en philosophie de l’islam… Il m’avait en effet initié à l’esprit du Coran mieux que ‎n’eût pu le faire un professeur d’al-Azhar. Et son sens de la valeur morale m’avait éclairé plus d’une fois. Je vois ‎d’ailleurs que mes idées sont les idées qui, ne pouvant mûrir ni surtout être récoltées chez lui, ont émigré chez moi. ‎Quand nous discutions des problèmes, c’était lui qui apportait souvent les idées, mais je les ordonnai, leur donnai ‎un sens doctrinal… C’est mon ami qui m’a révélé notamment la fameuse bataille de Siffin à laquelle je devais ‎donner ensuite une signification systématique dans le cycle de la civilisation musulmane. » ‎

‎5 Confirmant la « lutte idéologique » qui se déroulait dans cette pépinière de leaders maghrébins, Pervillé écrit : ‎‎« La majorité des étudiants algériens (sauf huit, semble-t-il) firent sécession pour fonder l’Association des ‎étudiants musulmans algériens en France ouverte à tous les étudiants d’origine indigène. Celle-ci fit preuve à ses ‎débuts d’un esprit nettement assimilationniste en élisant comme président d’honneur l’ancien gouverneur général, ‎Maurice Viollette…Ainsi, vers 1930, les étudiants algériens à Paris comme à Alger, semblaient très éloignés du ‎nationalisme maghrébin auquel adhérait l’AEMNA… Il est vrai que la scission de 1930 n’avait pas été totale. Des ‎Algériens participèrent à tous les bureaux de l’AEMNA de 1930 à 1936 ». L’historien français confirme point par ‎point les faits rapportés par Bennabi dans ses Mémoires ainsi que dans certains écrits comme l’article où il ‎rappelle les luttes entre Algériens au sein de l’AEMNA : « J’étais à Paris un « isolé » qui portait l’étendard encore ‎insolite de l’Islah contre vents et tempêtes. Si bien qu’en 1932 je fis scandale à l’Association des étudiants ‎musulmans algériens parce que j’avais proposé le nom du vénérable Ben Badis à la présidence d’honneur de cette ‎association ». Ce fut Viollette qui l’emporta. Et Bennabi d’ajouter : « Les étudiants furent les premiers à combattre ‎ma proposition. Et parmi eux, ceux qui sont aujourd’hui à la tête du mouvement national, car il est devenu une ‎activité florissante alors qu’il était, il y a un quart de siècle, une activité dangereuse. » (cf. « Nécessité d’un ‎congrès algérien du travail », la République Algérienne du 15 janvier 1954).‎

‎6 Dans l’Algérie coloniale, il existait deux types de communes : les communes de plein exercice, habitées en ‎majorité par des Français de souche et fonctionnant sur le modèle de celles existant en France, et les ‎‎« communes mixtes », habitées par les deux communautés, arabe et européenne, et dirigées par des ‎administrateurs nommés par le pouvoir colonial.‎

‎7 L’orthographe exacte du nom est Battestini. ‎

‎ 8 Cette rencontre est rapportée dans le Tome II en arabe des Mémoires, mais n’est pas mentionnée dans les ‎Mémoires inédits où Bennabi relate les deux circonstances dans lesquelles il eut à voir et entendre Louis ‎Massignon, début 1932 : la première fois à l’occasion d’une conférence donnée par ce dernier dans un temple ‎protestant où était organisée une « Journée de l’islam », et la seconde à la « Mutualité » où il était venu ‎conférer à l’invitation de l’AEMNA. ‎

‎9 Durant la même période (1929-1934), les Syriens Michel Aflak et Salah-Eddin Bitar, alors étudiants à la ‎Sorbonne, ont créé une « Association des étudiants arabes ». S’agit-il de la même ou d’une autre ?‎

‎10 La conférence, selon ce qu’en dit HBS lui-même dans une lettre à M. Abdelwahab Hammouda en date du 04 ‎septembre 1980, a été donnée une première fois au siège des « Etudiants musulmans nord-africains » à Paris en ‎décembre 1931 à la demande du regretté Salah Benyoucef. Il écrit : « C’est lui (et non Malek Bennabi) qui me ‎proposa comme vice-président de notre Association… J’en offris une copie – que j’étais naïf ! – au savant professeur ‎Louis Massignon, le 03 juillet 1932. Le 28 août 1932, pour la clôture du deuxième « Congrès des étudiants ‎musulmans », je devais faire une conférence en langue française (« Pour un humanisme vrai »). A la dernière ‎minute, mon camarade Benabdallah (un étudiant en droit) vint me dire que les dirigeants du « Cercle du Progrès » ‎voulaient une conférence en langue arabe, et il me rappela celle sur « Le Coran et la politique ». Je compris qu’une ‎raison avait agi dans l’ombre (Paris domine Alger) et j’eus un pincement de cœur. Mais, je relevai le défi. Le ‎résultat : près d’un demi-siècle d’épreuves et de souffrances. En 1948, Malek Bennabi dira : « C’est un véritable ‎assassinat ! » Il a cité ma conférence dans son livre « l’Étudiant » (Mémoires d’un témoin du siècle), tome 2, paru ‎en arabe seulement ! » ‎
Par ailleurs, HSB a gardé une coupure de presse rendant compte de sa conférence (« La presse libre » du 03 ‎septembre 1932 sous la signature de Aït Ahmed el-Mili) où on peut lire : « A l’occasion de la clôture du Congrès ‎des E.M de l’A. du N, notre ami M. Mohamed Ben Saï, vice-président de l’Association des Etudiants Musulmans ‎Nord-Africains en France et de l’Amicale Franco-Nord-africaine de Paris, tout récemment arrivé de Paris où il ‎poursuit ses études, donnait une conférence sur le sujet suivant : « L’Islam et la Politique ». Malgré sa jeunesse, le ‎conférencier traita de ce problème si vaste et si complexe avec une autorité et une profondeur dont nous avons ‎rarement vu l’exemple… L’auditoire transporté par cette parole si originale et si chaleureuse, fit une interminable ‎ovation au conférencier… Pour ses débuts, il a fait une œuvre magistrale et l’avenir nous prépare en lui un homme ‎d’élite qui fera hautement honneur à la pensée musulmane. » ‎

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