L’HOMME MALADE

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En 1853, le tzar Nicolas 1er a inventé l’expression « l’homme malade de l’Europe» pour ‎désigner l’Empire ottoman entré en déclin sur les plans économique, militaire et ‎diplomatique depuis près d’un siècle.

Le sultan-calife qui était alors à sa tête, Abdelmadjid 1er, était en excellente santé et ‎s’efforçait, à travers le programme de réformes surnommé « Tanzimat », de redonner ‎quelque lustre à son Empire. Si ce n’est lui qui était malade, c’était donc sa nation.‎

La formule sera appliquée un siècle plus tard à la Grande Bretagne affaiblie au lendemain ‎de la seconde guerre mondiale par la perte de son empire colonial et la récession de son ‎économie jusqu’à l’arrivée de Margaret Thatcher. Elle remportera la guerre des Malouines, ‎redressera l’économie et rétablira la puissance de son pays. ‎
Elle sera aussi appliquée à la Russie d’Eltsine avant qu’il n’accepte de se retirer au profit ‎d’un inconnu, Vladimir Poutine, qui s’imposera vite comme l’ « homme fort » du Kremlin… ‎
L’expression « homme malade » a donc été utilisée pour des empires en difficulté comme la ‎Grande Bretagne et la Russie, ou en voie de disparition comme l’Empire ottoman. Celui-ci a ‎été détruit par le conservatisme entêté des « ulémas » impliqués dans la vie des institutions, ‎comme en Arabie saoudite depuis l’instauration de la monarchie, et qui s’opposaient de ‎toutes leurs forces à la modernisation des lois et de l’administration, à l’adoption d’idées et ‎de techniques nouvelles et au changement du mode de gouvernance.

Le même conservatisme avait stoppé l’extraordinaire impulsion donnée dans tous les ‎domaines à l’Egypte par Mohammed Ali au début du XIXe siècle.‎

Que dire de nous qui ne sommes pas un empire, qui ne possédons pas de colonies mais en ‎avons été une, qui occupons les derniers rangs mondiaux dans tous les domaines, qui n’avons ‎connu que le déclin tout au long de notre histoire, et qui sommes dirigés par un vieillard très ‎malade ? ‎

En vérité, la locution de Nicolas 1er n’est pas applicable à nous mais aux nations qui ont été ‎grandes, fortes, qui ont atteint à la splendeur puis sont tombées de leur faste comme ‎l’homme qui se vide de ses forces à la suite d’une altération de sa santé. ‎
Que peuvent penser de nous et de Bouteflika, qui prête serment aujourd’hui, d’éminents ‎personnages comme les présidents russe et turc et la souveraine du Royaume britannique ?

QU’UN « CHAAB ADHIM » (GRAND PEUPLE) A MIS A SA TETE UN HOMME « MARID » ‎‎(MALADE), OU QU’UN HOMME « ADHIM » » A MIS A SES PIEDS UN PEUPLE « MARID » ? ‎
Je n’ai pas de réponse à cette question que j’abandonne à la perspicacité des lecteurs, ayant ‎assez à faire avec une autre : « Où allons-nous comme ça ? »‎
Boudiaf, que Dieu ait son âme, est mort doublement étonné. Il a été étonné à quelques ‎secondes de sa mort par le bruit de la grenade dégoupillée par le garde du corps, né après ‎l’Indépendance, qui allait le fusiller dans le dos, lui l’initiateur de la guerre d’indépendance.

Il a été étonné en 1964 par le cours pris par la Révolution du 1er novembre et mettra cet ‎étonnement dans le titre de son livre « Où va l’Algérie ? » ‎
Lors de l’audience qu’il a accordée en février 1992 aux figures de l’opposition, dont plusieurs ‎ont quitté ce monde sans en savoir plus que lui sur le destin de l’Algérie (Ben Bella, Mehri, ‎Kasdi, Amirat et Nahnah), j’ai essayé de lui proposer une réponse qui valait surtout pour ‎l’avenir auquel il était venu présider.

Je lui avais dit : « Monsieur le Président, vous n’avez pas affaire au peuple de Novembre ‎‎1954 mais à celui d’Octobre 1988. Vous n’êtes pour rien dans la crise algérienne, restez au-‎dessus de ceux qui, de part et d’autre, l’ont déclenchée… » Il en a été courroucé. ‎

Quand on pose une telle question, il ne faut pas s’attendre à une réponse car un pays n’est ‎pas comme un homme ou une femme qui peut répondre à une interpellation sur ses allées ‎et venues ou ses intentions vis-à-vis de l’Histoire. Un pays est constitué de dizaines de ‎millions d’hommes et de femmes qui peuvent aller dans une ou plusieurs directions, alléchés ‎par des mirages, portés par une funeste résignation ou poussés dans le dos.

Quand Boudiaf pose la question « Où va l’Algérie » et moi « Où allons-nous ? », ce n’est pas ‎tant le problème de la direction qui est soulevé mais un autre, subtilement caché et dont on ‎n’a peut-être pas conscience : celui de notre identité commune, de notre volonté collective, ‎du contenu idéologique et politique de ce « Nous ».

Car un pays ne se meut pas par lui-même comme un engin bourré d’automatismes, ce sont ‎ses habitants qui décident de sa destination et, par procuration, ses élites civiles et militaires ‎à l’endroit et dans les institutions où elles se trouvent.

CE DONT IL EST QUESTION ICI, C’EST LA DIRECTION QUE NOUS VOULONS PRENDRE EN ‎MATIERE CIVILISATIONNELLE. VOULONS-NOUS UNE SOCIETE MODERNE OU ‎TRADITIONNELLE, UNE SOCIETE DE CITOYENS OU UNE COMMUNAUTE DE CROYANTS, UN ‎PAYS DEMOCRATIQUE OU UN TROUPEAU GUIDE PAR DES HOMMES PROVIDENTIELS ‎FUSSENT-ILS A L’AGONIE ?

Notre histoire depuis l’Indépendance n’a pas suivi une ligne continue, un mouvement ‎constant et régulier vers l’avant ou dans la même direction. Elle a pris entre 1962 et 1979 le ‎chemin du socialisme qui s’avéra être une impasse. Elle a tourné en rond entre 1979 et ‎‎1988, jusqu’à ce qu’elle trébuche en octobre de la même année dans une mare de sang. Elle ‎a voulu faire un bond en arrière (vers les temps médinois exactement) entre 1989 et 1992. ‎Elle a erré comme une âme en peine entre les maquis terroristes et le risque de mise sous ‎tutelle de l’ONU de notre pays après les grands massacres qui ont effaré le monde. Elle a ‎trouvé un équilibre précaire grâce aux revenus des hydrocarbures entre 2000 et 2014…

ET VOILA QU’AVEC LE 4E MANDAT ELLE VEUT REVENIR A LA VIE BASIQUE DU DOUAR. ‎VISANT LES POLITIQUES ECONOMIQUES SUIVIES, J’AI QUALIFIE DANS DES ECRITS ‎ANTERIEURS CES PERIODES D’ « ETAT GERANT » (1962-1989), D’« ETAT GARANT » (1990-‎‎1999), D’« ETAT ERRANT » (1999-2014), ET SUIS PERSUADE QUE CELLE QUI S’OUVRE SERA ‎CELLE DE L’ « ETAT IMPOTENT ».

A l’Indépendance, la vision des autorités se voulait claire sur où nous voulions aller : ‎construction d’un État moderne, mise sur pied d’une économie de développement, ‎instruction publique généralisée, arabisation progressive, égalité entre l’homme et la ‎femme… Dans la pratique, on prenait les mesures allant dans ce sens mais on en prenait ‎d’autres aussi, allant en sens contraire, qui allaient dévier les premières de leurs objectifs. ‎

L’État moderne allait être perverti en « système » qui perdure à ce jour ;l’économie dirigée ‎se traduire par la destruction de la valeur-travail, de l’agriculture et de l’artisanat, une ‎dépendance de plus en plus accrue des hydrocarbures et des importations et une source de ‎corruption ; l’instruction publique ressembler à des garderies d’enfants et d’adolescents, et ‎l’arabisation se muer en haine de la langue française et de ceux qui la pratiquent. Quant à ‎l’égalité entre l’homme et la femme, elle fut subordonnée au Code de la famille.‎

Ces choix ambigus allaient cliver la société en francophones et arabophones diffusant autour ‎d’eux leur mode de pensée. Le peuple francophone est en voie de disparition et le peuple ‎arabophone en voie de prolifération, mais le genre qui prédomine est un hybride des deux ‎caractérisé par une effroyable chute de niveau aussi bien en français qu’en arabe. La façon ‎dont les nouvelles générations parlent l’arabe est singulière, ne se rapprochant d’aucun ‎accent arabe. Même la manière d’articuler les mots est étrange, évoquant des sons ‎gutturaux.‎

A la désorientation favorisée par l’incapacité des autorités à faire des choix cohérents et à ‎appliquer des réformes difficiles mais indispensables, s’est superposée une désorientation ‎idéologique amenée par l’ouverture politique de 1989 où en un court laps de temps le pays ‎s’est « Kaboulisé ». ‎

POLITIQUEMENT L’ISLAMISME N’EST PEUT-ETRE PLUS UNE ALTERNATIVE, MAIS ‎CULTURELLEMENT IL GAGNE DE PLUS EN PLUS DE COUCHES SOCIALES. L’ESPRIT DU ‎DOUAR N’EST PAS UN OBSTACLE POUR LUI, IL EST AU CONTRAIRE SON TERRAIN DE ‎PREDILECTION. LE SALAFISME FAIT DES RAVAGES, RESSUSCITANT L’ANCIEN ‎MARABOUTISME, LE FATALISME ET LE CHARLATANISME, ET SE POSE COMME UN ‎BARRAGE SUR LA VOIE DE LA MODERNISATION DES MENTALITES. ON N’A PLUS BESOIN ‎D’ALLER EN AFGHANISTAN, AU PAKISTAN OU EN ARABIE POUR VIVRE COMME LEURS ‎HABITANTS, ON A RAMENE LEUR MODE DE VIE, DE PENSEE ET D’HABILLEMENT INTRA ‎MUROS.‎

Arrêtons-nous aux images-télé que nous montre de temps à autre l’ENTV, qu’il s’agisse de ‎sketchs et pièces de théâtre des années 40 et 50, de films des années 60 à 80, ou de ‎documentaires, reportages et émissions de l’époque. Nous voyons d’autres hommes et ‎femmes, d’autres manières de parler, d’autres façons de s’habiller.

Il y avait dans les grandes villes des activités culturelles nombreuses et variées, des cycles de ‎conférences publiques, des salles de cinéma et des centres culturels étrangers actifs où un ‎grand nombre d’Algériens se rendait pour se distraire, se cultiver, ou débattre des ‎problèmes et des idées qui agitaient le monde.

Tout cela a disparu, et chaque année qui passe nous éloigne un peu plus des normes ‎acquises tout au long du XXe siècle et qui n’ont rien à voir avec le colonialisme lui-même. ‎C’était celles du progrès et nous venaient aussi bien d’Occident que d’Orient.

L’ORDRE, L’ESTHETIQUE, LES ARTS, LES BONNES MANIERES AVAIENT LEUR PLACE DANS ‎NOTRE VIE. NOS RAPPORTS ENTRE NOUS ETAIENT DETENDUS, FRATERNELS, EMPREINTS ‎DE RESPECT, DE SOLIDARITE ET DE TOLERANCE. IL Y AVAIT UNE JOIE DE VIVRE, UNE ‎INSOUCIANCE QUANT A L’AVENIR, UNE CERTITUDE QUE NOUS ETIONS DANS LA BONNE ‎DIRECTION ET QUE NOS DIRIGEANTS SAVAIENT OU ILS NOUS MENAIENT.‎

AU RETOUR EN ARRIERE SUR LE PLAN SOCIAL ET CULTUREL EST VENU S’AJOUTER LE ‎CHOC MORAL CAUSE PAR LE 4E MANDAT QUI VA NOUS ENFONCER DANS ‎L’ « ENCANAILLEMENT » EN LIVRANT LE POUVOIR AUX FORCES DE LA CORRUPTION ‎MORALE ET FINANCIERE.

BOUTEFLIKA PARTIRA UN JOUR OU L’AUTRE, MAIS APRES AVOIR AVILI LE PAYS ET SES ‎HABITANTS PLUS QU’ILS NE L’ONT ETE SOUS TOUS SES PREDECESSEURS REUNIS ET SES ‎TROIS MANDATS. CE N’EST PAS LUI « L’HOMME MALADE », C’EST LUI +NOUS. LUI DANS ‎LE CORPS, NOUS DANS LA TETE.

Portons notre esprit encore plus loin dans le passé, à la période coloniale, et posons-nous ‎cette autre question : qu’aurait été l’Algérie d’aujourd’hui, pour nous et les Français ‎d’Algérie, si les dirigeants de la IIIe et de la IVe République et les élites politiques « pieds ‎noirs» avaient écouté les élites politiques algériennes, de l’Emir Abdelkader au GPRA en ‎passant par l’Emir Khaled, Ben Badis, Messali Hadj et Ferhat Abbas ? Jusqu’à l’ultime minute ‎le GPRA avait donné des garanties à qui voulait l’entendre que l’Algérie indépendante ‎respecterait les droits des Français qui resteraient. Mais, à de très rares exceptions, ils ont ‎choisi « la valise » sous la pression de l’OAS. ‎

L’intéressant dans la question n’est pas l’aspect politique car on ne refait pas l’histoire, mais ‎les incidences économiques, sociales et culturelles qui auraient résulté pour le pays du ‎maintien d’une minorité d’ « Algériens d’origine française ». Est-on sûr que ça aurait été un ‎mal ? ‎

On a pris des Français d’Algérie et ils ont pris de nous puisque lorsqu’ils ont quitté notre pays ‎pour se replier sur la France ils se distinguaient nettement des Français de la métropole qui ‎les assimilaient presque à des « Arabes » en raison de leur façon de parler, de gesticuler, de ‎manger et de penser car il s’agissait bien d’une tournure d’esprit, d’une manière d’être ‎algéro-européenne née de leur brassage avec les Algériens du cru. Leur recyclage ne les pas ‎changés et ils ne se sont pas dissous dans la masse métropolitaine.‎

LORSQU’UN PAYS ARABO-MUSULMAN EST EBRANLE PAR UN CHANGEMENT DE REGIME ‎VIOLENT COMME L’ONT ETE L’IRAK IL Y A LONGTEMPS ET LA LIBYE RECEMMENT, ET QUE ‎LE POUVOIR EST MIS PAR TERRE, ON N’ASSISTE PAS A UN BOND EN AVANT MAIS A UN ‎RETOUR EN ARRIERE, AUX CONFLITS ET MASSACRES CONFESSIONNELS, AUX MILICES ‎ARMEES ET AUX CHEFS DE GUERRE, A LA VIE TRIBALE ET AUX VIEILLES HAINES.

Dans le cas de l’Irak et de la Libye, le changement de régime a été possible grâce à ‎l’intervention militaire étrangère, sinon les despotes seraient encore là. Comme en Syrie. ‎Après l’occupation de l’Irak en avril 2003 par les Américains et les Anglais, le penseur ‎palestino-américain Edward Said avait pris position et fait campagne contre cette ‎intervention.

Un intellectuel irakien, Khalid Kishtaini, l’a contré dans un article publié la même année par ‎‎« Asharq al-Awsat » où on peut lire : « Tous les sondages montrent qu’une majorité ‎d’Irakiens approuvent la guerre, l’occupation et l’administration occidentale, et souhaitent ‎leur maintien dans le pays… La raison est que nous nous sommes libérés de la tutelle ‎occidentale et que nous sommes retournés à nos racines sous-développées… Je suis parvenu ‎à la triste certitude que nous ne pourrons pas seuls reprendre le train de l’évolution là où ‎nous l’avons laissé dans les années quarante, afin de nous hisser au niveau des nations en ‎voie de développement. Nous n’y parviendrons pas sans un élément exogène qui puisse nous ‎emmener, voire nous conduire, sur cette voie. Sans cet élément étranger occidental, les ‎Irakiens n’auraient pu se débarrasser du régime de Saddam Hussein » (cf. « Courrier ‎international » No 670, Paris, septembre 2003).

On n’a pas vu les phénomènes et les malheurs observés en Irak et en Libye se reproduire en ‎Tunisie et en Égypte, deux États enracinés dans la conscience populaire. Les Tunisiens ont ‎trouvé dans leur société civile la force citoyenne nécessaire pour forcer l’islamisme ‎vainqueur aux élections à entrer dans une constitution moderne, alors que les Égyptiens ont ‎dû s’en remettre à l’armée pour les en débarrasser au risque d’une guerre civile qui a déjà ‎commencé parce que leur société ne recelait pas la force citoyenne nécessaire pour ‎contraindre dans le même sens l’islamisme : les forces démocratiques étaient désunies et ‎faibles, comme dans l’Algérie de 1991 et d’aujourd’hui.

Si bien que l’Égypte s’est vue obligée d’opérer une marche-arrière la ramenant à son point ‎de départ : l’année 1952 et les « Officiers libres », avec Sissi à la place de Nasser. Le ‎maréchal a demandé un mandat populaire pour liquider les Frères musulmans et il lui fut ‎accordé séance tenante. Les opérations sont en cours, mais Sissi n’est pas Atatürk ; il n’a pas ‎sa vision et se contentera donc de traiter le problème en surface.‎
En Tunisie l’esprit tribal, les chefs de guerre et l’intolérance envers les autres confessions ‎sont des paradigmes qui ont été effacés des mentalités il y a très longtemps et ont été ‎remplacés par une société homogène cimentée par des idées progressistes et où les ‎individus ont majoritairement été gagnés à la culture citoyenne. ‎
Dans la tourmente de la révolution, les Tunisiens ont trouvé à quoi s’accrocher : l’héritage ‎de Bourguiba et la constitution qu’il a laissée et qui a joué le rôle de gilet de sauvetage. Les ‎Libyens n’avaient pas cette chance. Kadhafi a détruit la monarchie traditionnelle des ‎Senoussi pour mettre à sa place une monarchie plébéienne, ignare et prédatrice formée de ‎sa famille et de membres de son clan qu’il a appelée « al-jamahiriya al-ôdhma » (c’est le ‎pendant de notre « châaba âdhim »). En voulant remonter à leur passé pour y trouver une ‎inspiration, ils ont vite rencontré l’ancienne organisation tribale et le découpage laissé par ‎Montgomery et entériné par l’ONU en 1949.

Et nous, que risquons-nous de trouver comme repères ou valeurs communes en cherchant ‎autour de nous, dans nos souvenirs et nos référents, s’il devait nous arriver un malheur ‎semblable à celui des Tunisiens, des Égyptiens ou des Libyens ? Un malheur dont en fait nous ‎avons déjà eu un avant-goût qui nous brûle encore la gorge. Eh bien, nous ne trouverions ‎rien ! ‎

LA GENERATION DE NOVEMBRE A TROP TERNI PAR SES ABUS, SES MAUVAIS EXEMPLES, ‎SON EGOÏSME ET SON AMOUR IRRAISONNE DE L’AUTORITARISME LES VALEURS ET LES ‎IDEAUX DE LA REVOLUTION. CE NE SONT PLUS QUE DES MOTS VIDES DE SENS. LE ‎POUVOIR N’A PAS LAISSE DE TRADITIONS DE GOUVERNEMENT QUI INCITENT A ‎L’IDEALISME MAIS AU SACCAGE, A L’EMEUTE ET AU NIHILISME DESTRUCTEUR, SURTOUT ‎CES DERNIERES ANNEES OU TOUT LE MONDE CONNAIT LES NOMS DES CORROMPUS ET ‎LES MONSTRUEUX MONTANTS QU’ILS ONT DETOURNES, SANS COMPRENDRE POURQUOI ‎ILS SONT PROMUS ET PROTEGES AU LIEU D’ETRE POURSUIVIS. EN PLUS ILS NARGUENT ‎LA NATION A LA TELEVISION PARCE SURS DE L’IMPUNITE. CELA NE S’EST JAMAIS VU ‎AVANT BOUTEFLIKA.

Par ailleurs, aucune constitution n’a laissé d’échos dans le subconscient algérien, et ‎personne ne croit au « pouvoir constituant » du peuple. Si une Assemblée constituante devait ‎être élue et se réunir pour rédiger une constitution, elle ne lèverait jamais la séance. ‎Comme le Congrès de Tripoli (1962) qui n’a pas, à ce jour, déclaré sa session fermée.

DEUX IDEES ONT CAPTE L’ADHESION DES ALGERIENS DEPUIS L’OUVERTURE ‎‎« DEMOCRATIQUE » DE 1989 : L’AMAZIGHISME ET L’ISLAMISME QUI DOMINENT ‎TOUJOURS LA CARTE IDEOLOGIQUE ET POLITIQUE DU PAYS. TOUT LE RESTE N’EST QUE ‎SOIT ENCANAILLEMENT POUR LES PARTIS ADMINISTRATIFS, SOIT COMPTINES ET PAS DE ‎DANSE DEVANT LE MIROIR DES MEDIAS POUR LE RESTE.

Or si on saute par-dessus la période d’indépendance et la Révolution, que pourrions-nous ‎trouver ? Un siècle et quart de colonisation française, précédés de trois siècles de Régence ‎turque, avant de tomber sur des royaumes régionaux éphémères et de type théocratique qui ‎ont fleuri quelque temps à Tiaret, Bejaia, Tlemcen ou Alger.

Seuls les Mozabites, n’étaient les inexplicables violences qui ont mis à mal leur cohabitation ‎avec les « Arabes », tireraient leur épingle du jeu car ils possèdent depuis des siècles des ‎institutions consensuelles qui régulent leur vie sociale et économique. Mais pourraient-ils ‎vivre en autarcie ? ‎

Le reste des Algériens n’a rien conservé dans son psychisme ou sa mémoire de relatif à ces ‎royaumes et dynasties. Encore moins de la période numide qu’ils ne connaissent que par les ‎livres d’histoire. Ce dont ils sont pleins en revanche, c’est de souvenirs tout frais, concrets et ‎vivaces qu’ils gardent et chérissent : ceux du bled, du douar, de la déchra, du ârch, de la ‎tribu, du dernier conflit pour une source d’eau, une limite de terre ou une haine recuite pour ‎un bestiau volé par un proche du gaïd avant la Révolution. ‎
Ils y trouveront le charme de la vie écologique mais aussi le virus de la division, des ‎querelles de voisinage, des jalousies ancestrales et des vendettas d’honneur.‎

Si notre État devait donc s’effondrer, et ça lui est arrivé entre 1992 et 1995 où il n’y avait ni ‎président, ni parlement, ni assemblées communales et wilayales, il y aurait toujours ‎l’armée, mais elle se ressentirait de cet effondrement et ne pourrait pas tenir indéfiniment ‎à bout de bras la nation désarticulée. Que peut-elle faire du reste dans un pays où ‎l’économie est à l’arrêt ou anéantie ? Sans elle, notre pays serait devenu un califat où les ‎chefs de guerre n’auraient pas tardé à proclamer chacun leur territoire d’influence, voire ‎leur émirat. ‎

Mais elle ne possède pas la solution durable, elle ne peut rien contre un problème de nature ‎socioculturelle comme on le constate au Yémen où les mentalités et les traditions sont ‎réfractaires à la notion d’État. ‎

LA SOLUTION IDOINE ET DURABLE EST DANS LA COHESION DE LA SOCIETE, DANS SON ‎UNITE MORALE, DANS SON ACCLIMATATION A L’ESPRIT REPUBLICAIN ET A LA CULTURE ‎DEMOCRATIQUE ET DANS SON DYNAMISME ECONOMIQUE.

‎« L’homme malade » turc s’est rétabli à partir de 1923 grâce à son armée et à l’esprit ‎décisionnaire de son chef, Mustapha Kamal, qui avait tôt compris qu’il n’était pas possible ‎d’échapper à l’occupation et au dépeçage territorial en traînant à son pied le boulet califal. ‎Aussi s’en est-il débarrassé par la force et instauré une République tournée vers la ‎modernité.

Mais, ô paradoxe ! c’est un gouvernement islamique qui, en une quinzaine d’années, a fait ‎de la Turquie pauvre héritée d’Atatürk et des régimes militaires un pays développé. Il a ‎réussi dans cette tâche parce qu’il a respecté le caractère républicain et laïc de la Turquie ; ‎il n’a pas été tenté d’exhumer le califat et a été encadré dans son évolution par les ‎‎« critères de convergence » dictés par l’Union européenne contre la promesse d’une ‎intégration qui, aux yeux des Turcs, tarde à être conclue.‎

Où va l’Algérie ? Ou allons-nous ? A notre destin tout simplement, un destin qu’on peut ‎connaître à l’avance contrairement à ce qu’on pense. ‎

Il sera assurément misérable et tragique si nous nous laissons prendre dans l’étau de ‎l’encanaillement venu d’en haut et du charlatanisme monté d’en bas, comme il pourrait être ‎celui d’un pays normal, doté d’atouts naturels et d’une population entreprenante qui, si elle ‎est bien éduquée et qu’on lui ouvre les portes du travail et de l’initiative économique, pourra ‎transformer les atouts de la nature en dynamique sociale profitable à tous. ‎

UNE SEULE CHOSE A DE TOUT TEMPS MANQUE A CE PAYS : UNE VISION D’ENSEMBLE, UN ‎DISCOURS DE VERITE, UN SENS DE L’EXEMPLE AU NIVEAU DE SES DIRIGEANTS ET UN CAP ‎ALLANT DU PLUS COURT AU PLUS LONG TERME.

‎(« LE SOIR D’ALGERIE » DU 27 AVRIL 2014)‎

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