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L’ISLAM A L’EPREUVE DES MUSULMANS (3e partie)

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Grand de taille, l’allure imposante, le Dr. Behechti ne doit pas avoir plus de 60 ans. Il nous reçoit avec chaleur et salue à travers nous l’Algérie révolutionnaire. L’arabe qu’il pratique est de très haute qualité. C’est celui de l’ayatollah qu’il est, doublé de l’auteur de maints ouvrages ainsi que de l’excellent germanisant qui a traduit de l’allemand au persan et vice-versa plusieurs livres à caractère historique.

Il nous questionne sur l’Algérie avant de se prêter à nos propres questions : il nous récapitule les grandes phases de la révolution qui, nous explique-t-il, remonte à très loin dans l’histoire de l’Iran, à l’opposition au pouvoir immérité de Muawiya et de Yazid. Depuis, l’Iranien chiite a toujours considéré comme illégal le pouvoir non élu, celui qu’incarneront tyrans et monarques le long de l’histoire perse. Cela, ponctue le Dr Behechti, c’est l’attitude fondamentale, la disposition d’esprit de l’Iranien sans laquelle rien ne peut être compris dans les évènements actuels.

L’époque contemporaine a été marquée par le refus des Pahlavis, refus qui apparaitra à travers le combat mené dans les années 1920 par Mirza Khan qui proclama la république du Guilland, ou celui de Mossadegh qui nationalisa le pétrole en 1951. En dépit des sanglantes répressions qui devaient s’ensuivre, le peuple iranien s’est de tout temps soulevé contre l’abus et le despotisme. Son combat est donc ancien. Les évènements auxquels vient d’assister le monde ont leur point de départ dans la « révolution blanche » lancée par le shah en 1963. Ce ne devrait plus être que révoltes et représailles, manifestations populaires et tortures jusqu’en février dernier.

« Hizb el Djoumhouria-l-Islamiya », répond le Dr Behechti, a été créé il y a trois semaines (nous sommes le 10 mars). Nous comptons à ce jour quelque 500.000 adhérents dont près de la moitié pour la seule région de Téhéran. » Sa raison d’être ? « Organiser le pouvoir islamique en Iran, aider à la formulation politique de sa doctrine, traduire celle-ci en faits, en actes nationaux et quotidiens, mettre sur pied, petit à petit, les organes les plus aptes à exprimer notre weltanschauung, notre souveraineté idéologique. »

En politique comme en économie,poursuit le Dr. Behechti, ne nous importe que ce qui représente le Juste. Nous ne nous égarerons pas dans les catégories forgées par d’autres, pour d’autres contextes. La pensée islamique est un mode de conception particulier. Elle n’est pas dialectique, je veux dire fondée sur l’antagonisme des pensées ou le conflit d’intérêts, mais combinatoire, intégratoire du temporel et du spirituel ».

A une question sur l’avenir des rapports entre les ulémas et le pouvoir exécutif le Dr. Behechti nous déclare : « Là non plus il n’y a pas lieu de raisonner en termes d’antagonisme, de conflit. Les ulémas regarderont le pouvoir exécutif comme un travail de transformation de l’ancien Etat en Etat islamique véritable, et le pouvoir considérera pour sa part les ulémas comme l’autorité spirituelle de laquelle il tire sa légitimité. »L’entrevue se termine vers 21h sur l’expérience algérienne que le leader iranien nous assure suivre avec le plus grand intérêt.

De retour à la maison, chez Hussein, nous engageons à trois une discussion au cours de laquelle nous essayons de faire le point. Nous pensions avoir suffisamment vu et entendu pour tenter un premier bilan : il y a un mois, un des plus importants pays du monde, une réserve de 60 milliards de barils de pétrole (chiffre de 1974), un revenu pétrolier de 24 milliards de dollars par an, la cinquième armée du monde, un point vital de la géopolitique, tombaient entre les mains du peuple par suite d’une révolution dont le thème n’est ni économique, ni spirituel.

Sur l’échiquier mondial c’est la stupeur mais aussi l’alarme. L’occident craint pour ses intérêts, certains pays pour leur cohésion ethnique, les monarchies pour leur pérennité, les dictatures assistées pour la fiabilité des dispositifs de maintien sur lesquels elles reposent, les idéologies pour leurs argumentaires… Bref c’est la panique.

Dans le monde on estimait que les choses étaient déjà assez compliquées pour que vienne s’y ajouter le pensum iranien. Quant à l’islam, on le sait, c’est l’éternel malvenu. Il n’y a d’abord rien à faire. Ce n’est pas l’Iran de 1953, ce n’est pas « Old Mossy », on n‘y comprend goutte au langage que tient ce Khomeiny… Et puis ces bombes atomiques ou thermonucléaires ont l’air si bête. Puis c’est l’assaut, sauvage, aveugle, le feu-de-tout-bois, le tout azimut en attendant de voir plus clair pour ajuster le tir.

La réaction s’organise progressivement, l’objectif apparaît, il faut viser la tête, atteindre les idées. On ameute toutes sortes de « compétences » depuis le fieffé menteur jusqu’au plus grand spécialiste (du chiisme, du Bahaïsme, du Mazdéisme, etc.). Un fantastique, une fantasmagorique campagne de presse est déclenchée. Il faut briser l’Archétype, créer des clivages qu’on appelle « les forces en présence », semer doute et confusion, hurler à l’échec, à l’impasse, discréditer, compromettre, dissoudre… La Révolution est assaillie de toutes parts.

A l’intérieur de l’Iran les sœurs, filles ou épouses des ex-Savak sont de la « guerre du Tchador ». En communion avec les ci-devant filles et dames de cours elles organisent une marche que « Le Monde » qualifiera d’« affaire nationale de première importance » (édition du 13 mars) et que le « Parisien Libéré » estimera à 50.000 (!) personnes (édition du 12 mars).

L’un et l’autre avaient eu tout le loisir de déverser rancœur et ressentiment. Deux jours plus tard, la télévision présentera un débat public entre les femmes anti-voile et M. Ghotbzadeh d’abord, ensuite Bani Sadr.

Une liberté d’expression pareille ne s’était vue nulle part ailleurs auparavant. A Qom, l’ayatollah Khomeiny avait déclaré : « Nous n’avons aucune crainte de ce que les gens peuvent dire, et tout le monde est libre d’exprimer ses pensées et ses opinions ». Le ministre de l’information, M. Nasser Minatchi, dira à la presse qui l’interroge : « Le fondement de mon ministère repose sur cette liberté… L’importation de publications et journaux étrangers restera libre pour permettre à l’opinion publique d’en prendre connaissance et de juger ». Cela aussi est inédit.

La presse iranienne, quant à elle, n’a jamais été aussi libre. La preuve est qu’elle peut parler de « clergé » et employer des étrangers. Comme c’est le cas pour le « Journal de Téhéran » dont seul le Directeur est Iranien et qui informe ses lecteurs à partir de dépêches… de l’AFP. Quel pays aurait toléré de telles situations ? En Iran on n’a même pas eu le geste de Napoléon écrivant à son ministre, Fouché je crois, à propos des journalistes : « Dites-leur que je ne les jugerai point sur le mal qu’ils auront dit, mais sur le peu de bien qu’ils n’auront pas dit ».

Mais la réaction à l’intérieur n’a pas été que cela, ne s’est pas limitée à une cabale journalistique. L’oncle de Hussein, un vieil homme bien de chez nous, nous relate un incident qui s’était produit dans le quartier en notre absence. Un incident ? Un crime inqualifiable, inhumain : à un groupe de révolutionnaires chargés de veiller sur la sécurité nocturne de l’arrondissement, deux « samaritains » avaient remis un panier contenant de la « nourriture ». En Iran, pareille démarche n’a rien pour surprendre, elle fait partie des mœurs, surtout en cette période. D’où la confiance des jeunes révolutionnaires. Trois d’entre eux sont morts déchiquetés : le panier était piégé. Par des membres de l’ancienne SAVAK.

Le lendemain devait être pour nous une journée particulièrement chargée. Nous avions rendez-vous avec les « Moudjahidine Khalq » à 15H, avec le philosophe Djaâfari à 20H et avec Bani Sadr à 22H.

Les « Moudjahidines » sont une organisation paramilitaire née de la détermination de passer à l’action armée. A l’origine, ils n’étaient qu’une infime fraction au sein du « Mouvement de libération de l’Iran » créé en 1963 par Bazargan et Teleghani notamment. Ils se lancent dès 1968 dans l’action et se font connaître par d’audacieuses opérations contre le régime impérial. Infiltrée par la SAVAK, l’organisation perdit dans les années 70 ses principaux cadres.

Leur siège, dans l’ex-fondation Pahlavi, au centre de Téhéran, est une véritable forteresse gardée par un blindé et de jeunes gens surarmés. Nous sommes soigneusement fouillés avant d’être admis dans le bâtiment. Une jeune fille, tête recouverte du « hidjab » et jeans sous une longue tunique, nous précède dans un dédale de couloirs au bout duquel elle nous fait entrer dans un bureau où nous demeurerons en attente près d’une demi-heure avant que nous reçoivent trois responsables dont nous ne saurons jamais l’identité. Un seul d’entre eux répondra à nos questions. Les autres traduisent.

Mais, pour l’heure, c’est nous qui sommes soumis à un feu roulant de questions qui ne laissent pas de nous irriter : qui être-vous, à quel titre êtes-vous en Iran, comment y être-vous parvenus, à quelles fins, qui vous a parlé de nous, qui avez-vous rencontré avant nous ?

Cette situation d’interviewers interviewés nous déroutait. Enfin on voulut bien nous entendre et nous répondre, quoique d’une façon par trop évasive. Mon compagnon et moi, comme avant toute rencontre, avions préparé un questionnaire en bonne et due forme mais à nos interlocuteurs il dut paraître trop précis voire indiscret. Et pour cause !

Nous voulions savoir : les origines de leur mouvement, le bilan de leur action, les facteurs ayant permis à la SAVAK d’infiltrer l’organisation, leur position à l’égard du Toudeh (parti communiste iranien) et des « Fedayin Khalq » (extrémistes marxisants), leurs rapports avec Khomeiny, leur avenir dans la République islamique (parti officiel ou organisation secrète ?), leurs objectifs après la chute de la monarchie, leurs relations internationales…

Il nous faut avouer que la moisson d’information que nous pensions recueillir fut en définitive bien maigre. La méfiance et la circonspection de nos interviewés ayant pris le dessus. Tard dans l’après-midi nous devions les quitter n’en sachant pas plus sur eux, à notre grand désappointement, que quelques heures plus tôt lorsque nous avions franchi le seuil de l’antre des « Moudjahidines Khalq Iran », c’est-à-dire qu’ils œuvrent pour une société égalitaire et sans classes, et que leur discours est un syncrétisme d’islam et de marxisme. Aujourd’hui, avec le recul, nous nous demandons si en fait il y avait beaucoup à apprendre sur eux, du moins quelque chose d’essentiel.

Notre rendez-vous avec le philosophe Djaâfari (que nous avons évoqué précédemment) eut tôt fait de nous consoler de notre déconvenue. Nous voudrions lui rendre encore un hommage ému en souvenir des riches moments passés avec lui.

Chez Bani Sadr, malgré l’heure avancée (il devait bien être 23H), il y a foule. Des journalistes iraniens aussi bien qu’étrangers se pressent autour de celui qui est l’un des conseiller les plus écoutés de Khomeiny. On lui annonce aussitôt notre arrivée, sur quoi il vint nous serrer la main. Une demi-heure plus il était à nous.

Bani Sadr parle très bien le français, la discussion n’en est que plus aisée entre nous. Le sachant responsable des relations de l’Etat avec le monde du travail, nous l’interrogeons sur le sens de sa mission. « Les ouvriers, nous répond Bani Sadr, ont la responsabilité de la reconstruction du pays. Ce sont eux qui devront prouver la capacité de l’islam dans un monde économique difficile. Mon rôle est de les informer, de leur expliquer la situation, et non de leur faire des promesses ou de leur donner de fausses espérances. En islam les instruments de production sont aux mains des travailleurs, de même que le pouvoir de décision. »

A une question sur les principes économiques qui régiraient la société islamique Bani Sadr répond : « Nationaliser davantage ou dénationaliser n’a pas de sens en soi. 80 % de notre économie sous le shah était étatique. Cela n’empêchait ni l’exploitation ni la corruption. Dans la société iranienne de demain, il n’y aura pas de dénationalisation. L’Etat aidera l’entreprise, l’orientera, s’assurera de l’amortissement du capital. Nous disposons d’une doctrine économique précise. Quoique les théories ne suffisent pas. Le principal est de créer une conscience de travail. Ce que j’essaie d’expliquer aux ouvriers. »

A propos de la situation financière de l’Iran Bani Sadr dira : « 5 milliards de dollars, notre dette extérieure, c’est le dixième de ce que doit avoir en banque le shah. Aussi, doit-on s’adresser à lui pour le remboursement. Quant à nous, nous renions cette dette. Notre prochain budget sera de l’ordre de la moitié de celui de l’année dernière sous le shah. 12 milliards de dollars, c’est même trop pour notre économie. »

Nous l’interrogeons sur la presse iranienne et étrangère : « La presse nationale a été conditionnée par 50 ans de régime Pahlavi. Pour nous, il n’est pas question de censurer, mais de créer la véritable presse islamique. A l’étranger, l’argent du shah et de la grande bourgeoisie finance la propagande anti-islamique ».

De la situation dans le pays Bani Sadr nous dira : « Il y a un moins, on pouvait prendre le pouvoir en Iran avec 1000 hommes. Ceux qui veulent aujourd’hui nous créer des difficultés le savaient, mais savaient aussi la profonde vérité. Khomeiny est plus fort dans leurs mouvements que leurs propres chefs. Cela aussi ils le savent. Une guerre civile ici n’est pas possible. Il n’y a pas des « forces » mais une masse et des poussières, le tout et le néant. Bien sûr, on peut toujours craindre des troubles. Ce n’est pas qu’ils puissent mettre en péril la Révolution, mais des troubles c’est toujours regrettable. »

Vers 0HOO, nous prenons congé de M. Bani Sadr. En rentrant, nous sommes arrêtés par un barrage de jeunes révolutionnaires. Hussein exhibe ses papiers et nous passons. Nous sommes soucieux.

Pourquoi en est-il ainsi dans le monde ? Quand, sur quoi y aura-t-il unanimité ? Dans « La Guerre civile en France » Marx écrit, désabusé : « Dans toute révolution il se glisse, à côté de ses représentants véritables, des hommes d’une autre trempe ; quelques-uns sont des survivants des révolutions passées dont ils gardent le culte, d’autres sont de simples braillards qui, à force de répéter depuis des années le même chapelet de déclamations stéréotypées, se sont fait passer pour des révolutionnaires de la plus belle eau. » Marx ajoutera : « Ils sont un mal inévitable ». Ce qui est en quelque sorte réconfortant, venant d’un homme de l’expérience du théoricien du communisme.

Il y a quelque temps, Khomeiny proposait un débat public et télévisé au parti Toudeh. Celui-ci, sitôt la monarchie tombée, se lance dans une surenchère effrénée à l’intention d’embarrasser la direction révolutionnaire : il revendique la semaine de cinq jours et de trente heures, menace de grèves, publie communiqué sur communiqué… Devant la somme, le reste paraît bien grand. Le premier ministre Bazargan crie à la trahison, tire le passé de ce parti qui tient ses assises dans un pays européen (plénum du 16 mars dernier) alors que l’Iran est libéré. Vivant, Lénine aurait écrit de nouveau «  Que faire » pour dénoncer l’ « économisme » et l’ « ouvriérisme » du parti Toudeh.

Il est vrai que le Toudeh a de tout temps eu des positions en retrait sur l’histoire. Fondé en janvier 1942 pour combattre aux côtés des Alliés l’influence et les intérêts germaniques en Iran il devait, dès 1944, avoir ses premières empoignades avec l’aile nationaliste. Cette année-là, en effet, le député Mossadegh fait au Majless un discours contre l’octroi de toute concession pétrolière dans les provinces du nord sous influence russe. Le 2 décembre il dépose, pour ratification, un projet de loi interdisant à tout gouvernement d’octroyer des concessions pétrolières. Le Toudeh vote contre.

Il connaitra avec eux les mêmes difficultés quand il sera, en 1951, au pouvoir. Très proches « objectivement », comme on dit, du Toudeh, les « Fédayin » qui sont aujourd’hui dans la clandestinité et les laïcs libéraux représentent un sérieux facteur de frein en ce sens qu’ils sont les hauts cadres de l’Etat (du shah et de Khomeiny), des professions libérales, de l’enseignement supérieur, etc … Tous trois s’organisent pour « faire face au pouvoir islamique » comme a dit M. MatineDaftari. Ils ne sont peut être que « ces révolutionnaires de la plus belle eau » qui sont « un mal inévitable » à en croire Marx.

Dans quelques jours nous aurons quitté la révolution iranienne. On allait rencontrer d’autres personnes, assister à de nouvelles situations, apprendre encore plus sur la conjoncture… Mais l’important n’est pas cela, n’est plus de raconter scrupuleusement et dans ses moindres détails le voyage.

Quand on l’a fait c’était afin de voir l’essentiel derrière le détail, la note, l’anecdote.La révolution iranienne est aujourd’hui un fait établi. Elle appartient déjà à l’Histoire. Mais ce n’est pas encore tout : a-t-elle un avenir, je veux dire l’espoir du succès, de la réussite ? Tout est là.

D’une manière générale, c’est le problème de l’islam lui-même qui se trouve aujourd’hui posé. Une fois de plus il est à l’épreuve des musulmans, c’est-à-dire de la partie de l’humanité qui s’en prévaut depuis voilà quatorze siècles. A la réflexion, on se rend compte que le problème de l’islam est loin même d’être correctement posé à l’échelle humaine.

Qu’est ce qui peut expliquer qu’une cruelle monarchie puisse s’en réclamer de la même façon, avec la même quiétude, que ce décadent ou ce dénaturé qui se croit bien souverain ou vous parle d’authenticité ?

Y a-t-il euun islam vécu, un Etat islamique, depuis Siffin ? Depuis le Prophète même quand on sait que de ses quatre successeurs, trois mourront assassinés ? Existe-il une pensée islamique comme on peut parler de pensée ou de système marxiste ou libéral ? Le cas échant où ? Chez qui ? Quand ?

« Tel homme tel Dieu »disait Goethe.

Allah dans l’Histoire, c’est l’image qu’en a donné au monde le musulman, une image peu brillante il faut en convenir. Le même Goethe disait pourtant dans une correspondance à Eckermann :« En dépit de tous nos systèmes, nous ne pouvons aller, et d’une façon générale aucun ne peut aller plus que cela(l’islam) ».Qu’est-ce que cette logique alors qui condamne le meilleur à n’apparaître que sous les traits historiques du pire ?

Nous le constatons avec la révolution iranienne, l’islam n’a pas encore trouvé sa formulation temporelle, il n’a pas de « mode d’emploi », il n’existe pas à l’état de « recettes » praticables, expérimentables, reproductibles, Il n’a pas de doctrine de l’Etat, les musulmans n’ont rien fait pour exprimer l’islam en institution claires et fiables.

A l’image d’un Iqbal appelant à la « reconstruction de la pensée théologique de l’Islam », le musulman n’a pas vu qu’il s’agissait de tout autre chose que de credo ou de théologie, qu’il s’agissait de rendre l’islam opératoire, fonctionnel, d’en faire, selon la formule d’Henri Massis une« vérité travaillante ».

Le « musulman sociologique » se débattra longtemps encore dans ces problèmes. On n’entrevoit pas l’ombre d’une solution. C’est qu’il ne s’est pas lancé ce cri de Kant :« Saper aude ! »(Ose juger par toi-même !)

« Dieu, dit le Coran, ne change rien à l’état d’un peuple tant que celui-ci n’a rien modifié en lui-même ».

« El-Moudjahid » du 4 juin 1979

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